L’histoire nous a appris qu’il existe un fer de lance indispensable à la croissance économique des pays émergents : l’agriculture. Celle-ci permet non seulement de mettre partiellement un terme aux problèmes de famine et de sousnutrition des populations mais également de développer les exportations de matières premières sans recourir nécessairement à des investissements de Recherche et Développement propres à l’industrie moderne desquels ces pays sont encore très largement privés.
Alors que les échanges sur les produits agricoles sont mondialisés depuis longtemps, l’Afrique a pu maintenir un avantage comparatif sur certaines denrées alimentaires qui ont assuré sa place dans la chaine agroalimentaire mondiale, nonobstant la forte concurrence d’autres pays d’Asie et d’Amérique latine : le café, le cacao…et plus récemment l’huile de palme. Sur ce point, le Burkina Faso et d’autres pays africains tels que le Ghana ou encore la Sierra Leone ont pu bénéficier de l’aide précieuse du gouvernement français et de son agence de développement, l’AFD. Cette dernière a apporté son soutien à de nombreux petits producteurs d’huile de palme, créant des emplois et de la richesse mais également assurant une source de nutriments essentiels comme les vitamines A et E, particulièrement pour les familles victimes de carence alimentaire en Afrique.
Malheureusement, ce produit d’exportation doit désormais faire face à un obstacle aussi massif qu’inattendu : sous couvert d’une responsabilité prétendue, certains groupes de la grande distribution française affichent depuis peu leur volonté de réduire drastiquement l’utilisation d’huile de palme dans leurs produits en avançant des arguments de santé pourtant contestables et contestés. Cette démarche, qui feint d’ignorer les qualités nutritionnelles du produit, n’a d’ailleurs littéralement aucun équivalent en Europe !
Triple erreur ?
A l’heure où les pays producteurs ont multiplié les engagements pour recourir à des modes de production durables de l’huile de palme, voilà que l’on nous assène donc l’argument nutritionnel d’un produit pourtant plus sain que ses alternatives ou autres produits qui eux ont pourtant droit de cité sur les étalages des grandes surfaces commerciales. Mais ce faisant, les chaines de la grande distribution qui boudent cette huile savent-elles qu’elles commettent une triple erreur ? Économique d’abord car génératrice d’un renforcement de la hausse des prix, écologique ensuite puisque l’huile de palme possède un rendement et une empreinte carbone bien meilleurs que les autres huiles végétales, mais humanitaire enfin car les grands réseaux commerciaux font en effet payer le prix fort aux petits producteurs africains, les privant de cette culture.
Fort heureusement, d’autres chaines de supermarchés, comme Carrefour en Indonésie, ont su opter pour des politiques de traçabilité consistant à acheter l’huile de palme certifiée chez de petits producteurs. Si leurs concurrents avaient seulement pu suivre cet exemple, cela aurait eu un effet bénéfique pour les petits agriculteurs et les communautés africaines locales : certes, l’huile de palme, tout comme le cacao ou le café, ne mettra pas fin à la sous-nutrition en Afrique mais en assurant le développement des communautés locales, elle pourrait largement y contribuer.
A l’heure de Rio+20, de la hausse massive des cours mondiaux des denrées alimentaires, et alors que le premier ministre britannique a annoncé la tenue d’un sommet international contre la faim, il est regrettable que certaines chaines de supermarché aient encore occulté cette réalité.