L’Afrique avec sa cohorte de catastrophes naturelles ou politiques (les pandémies telles le sida et le paludisme, les guerres civiles et un sousdéveloppement économique qui semblait une fatalité) a brusquement reculé pour laisser le devant de la scène médiatique aux régions du monde qui avaient jusqu’ici échappé, dans le périmètre intérieur de chacun des États qui le composent, à une publicité dégradante. Une fois n’est pas coutume, pourrait-on penser. C’est vrai ! Et pourtant, l’Europe et les États-Unis semblent depuis quatre longues années s’installer longtemps dans une situation qui rappelle les heures sombres de leur histoire. Souhaitons que rien de tel n’advienne, en espérant toutefois que les causes ne soient pas les mêmes que celles que le monde a connues au début des années 1920.
Quid de l’actualité de Karl Marx
Comparaison n’étant pas raison, force est de constater, cependant, que les constantes dans l’histoire des sociétés existent, et il suffit de les ignorer pour qu’aussitôt elles pointent le nez. Et cela quel que soit le degré atteint dans le développement de la civilisation de certaines entités ou certains groupes humains. Le contexte de la formation des États européens, notamment, et de leur évolution montre une constante : la GUERRE
Depuis le haut Moyen âge jusqu’aux deux guerres mondiales, cela fait plus de mille ans. Que de querelles intestines ou de conquêtes sur une base presqu’immuable : l’accumulation des richesses matérielles. Une telle civilisation fondée sur une culture de l’esprit d’antagonisme prédateur secrète nécessairement l’envie (une démesure). Et quand bien même l’État est institué, il est une superstructure qui, en termes énoncés dans le matérialisme dialectique de Karl-Marx, ne peut que favoriser les idéaux des classes qui l’ont promu (aristocratie, royauté, bourgeoisie) et déclenche par ricochet la haine des classes assujetties.
Marx, le philosophe, de conclure par le célèbre théorème : « Toute l’histoire de l’humanité est celle de la lutte des classes » (voir le manifeste du Parti Communiste de Marx et Tugel). Depuis 1945, il n’y a pas eu une nouvelle guerre mondiale. Plus encore, la plus grande superstructure dont le marxisme avait fait une sorte de prototype de la fin de l’histoire, l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS) s’effondre en 1991, emportant avec elle l’acuité de la lutte des classes. Pire, la mondialisation qui semble cheviller le triomphe du Capitalisme amplifie le discrédit affectant les idées de Marx dans les pays mêmes qui en avaient fait le centre de leur existence.
Est-ce pour autant que Karl Marx avait tort sur toute la ligne ? L’affirmer, aujourd’hui serait présomptueux. Eh bien quoi ? Le philosophe et sociologue juif allemand avait déroulé son tapis de concepts restés célèbres parmi lesquels ceux de contradictions principales et secondaires de la dialectique matérialiste. En comparaison avec les dernières évolutions économiques, les conceptions hier décriées sont rehaussées par des faits qui sont comme surgis des abîmes de l’ignorance populaire. Aujourd’hui, à la lumière d’une crise que d’aucuns n’hésitent plus à comparer à celle de 1929, les choses sont plus claires. Que les économies des pays affublés à tort ou à raison de l’épithète "̏plus riches du monde " fonctionneraient, en dépit des algorithmes que pas grand monde ne comprend, d’une manière irrationnelle. Tour à tour, les différentes étapes de la tragédie socio-économique, de 2007 à 2011, nous apprennent que les théories les plus affutées ont été prises au piège d’une pratique débridée (trituralisation, subprimes etc …), ce qui correspond au concept marxiste de la contradiction secondaire. Ensuite M. Bush ayant déclenché l’apocalypse financière en laissant s’écrouler la grande banque américaine Lehman Brothers, ce qui restait en accord avec la vulgate libérale du laisser-faire. Mais le ver étant dans le fruit même, le Président américain n’avait pas le choix : se contredire d’une manière décisive en abandonnant le dogme pour une pratique qui ouvre des perspectives inverses à la sauvegarde d’un système dont il a été le gardien. (Contradiction principale).
Ensuite, on a su désormais que les États-Unis étaient très endettés (99 % de son produit intérieur brut). Que certains pays européens étaient dans un endettement tel qu’ils ne pourraient jamais s’en acquitter et qu’ils allaient se rapprocher par les conditions de vie de leur population, dans un court délai, du Tiers-Monde d’avant l’émergence de quelques Nations en son sein. C’est aussi ce qui attend les grands États, à l’exception de l’Allemagne, de ce continent autrefois nimbé de prestige et porté au pinacle de la prospérité ininterrompue depuis la fin de la « drôle de guerre ».
Le plus grand danger ? Que l’histoire se répète et que l’Europe et les États- Unis retrouvent la guerre.
En effet, l’exacerbation des sentiments qui naissent du manque (la paupérisation extrême des couches les plus faibles qui sont toujours en plus grand nombre dans ce cas), incite à aller ailleurs dénicher son espace vital.
Les élites sociales et politiques qui émergent dans de telles circonstances sont généralement médiocres et foulent au pied l’ordre moral. En flattant la psychologie élémentaire de la foule qui fait pièce à la démagogie de ces personnages perçus tels des héros mythologiques, les tyrans prennent sans coup férir le pouvoir. En l’espèce, on peut dire également, à l’instar d’Alexis de Tocqueville, que bien souvent « les peuples ont les dirigeants qu’ils méritent ».
Bien entendu, ce ne sont que des hypothèses. Mais elles ont le mérite de s’appuyer sur des données dont la similitude avec un passé archiconnu inquiète de plus en plus.
L’Europe qui, par certains aspects liés aux influences culturelles particulières, se présente différente des États-Unis, est aux prises avec un courant doloriste qui s’applique à un éventail de postes budgétaires touchant au bien-être des fonctionnaires et des retraités. Cela a un nom : l’austérité, voire la misère.
Aux États-Unis où la crise n’a fait que rendre plus aigus les ravages de la vénalité et de l’obscurantisme par le Tea-Party interposé, on a vu les Républicains mettre en avant, dans les primaires électorales, des tonneaux vides qui n’ont pas inventé la poudre mais que les foules adulent. Elles boivent comme du vinaigre les propos d’un des candidats, noir de peau : « Les pauvres et les chômeurs n’ont à s’en prendre qu’à euxmêmes ». Ces propos sont tenus alors que « la plus grande économie du monde » voit sa croissance mise en berne et atteint un taux de chômage de 30 %. Sous le manteau du conservatisme le plus éculé se cachent les extrémistes les plus dangereux en ces époques où, en Amérique, les démons qu’on croyait à jamais exorcisés reprennent du service.
On tremble presque, en imaginant l’éventualité de l’arrivée au pouvoir en novembre 2012, de ces personnages sinistres. Trop de zones de tension dans le monde risqueraient de s’embraser. Quant aux Européens, ils peuvent toujours causer et ne rien voir venir. En Allemagne voisine, il a été découvert un complot d’extrême-droite à grande échelle dont les autorités allemandes prétendent ne s’être jamais aperçues. Face à ce syndrome rampant de la montée de l’extrémisme de droite aux relents de fascisme et de nazisme, l’Union européenne semble paralysée. Un indice cousu de fil blanc est placardé sur la place Schuman à Bruxelles mais personne n’a l’air de s’en apercevoir. Il s’agit bien sûr du gouvernement hongrois qui peut se permettre, en dépit de la convention européenne des droits de l’Homme, de détruire les foyers pour sans-abri à l’approche de l’hiver, de les empêcher de mendier leur misérable pitance, de les jeter en prison à défaut de les reléguer dans leurs villages où les emplois sont inexistants. Tout ces malheurs leur arrivent parce qu’ils sont pauvres (lire l’article du journal « Le Monde » du 18 novembre 2011 en page 4 – International).