Dans plusieurs endroits du continent africain, des gens meurent de façon étrange. A en croire un mythe fort ancré dans le substrat socioculturel, il existerait des sorciers dotés de pouvoir surnaturel, capables de manger l’âme des êtres humains. Vrai ou faux ? That’s the question.
Aujourd'hui, si certains essaient de soutenir que le phénomène des mangeurs d’âmes est une pure invention de l’esprit, il n’en demeure pas moins que dans de nombreuses contrées, il est fort considéré comme une réalité. « C’est bel et bien réel » affirment des milliers d’Africains dont ce Malien, Issakha Dembelé, rencontré à Bruxelles. « Dans notre village à Kolobo, mon cousin est mort, il y a sept ans, à cause des oeuvres maléfiques d’un sorcier sur lui », soutient-il. En effet, depuis la nuit des temps, cette croyance a prévalu dans nos croyances et nos coutumes africaines. Ce phénomène des mangeurs d’âmes est directement associé à la sorcellerie qui occupe, dans certaines cultures, une importance primordiale dans la vie quotidienne. En effet, dans de nombreux cas, cette sorcellerie détermine le choix social des uns et des autres grâce à de fortes pratiques occultes qui les orientent dans la voie positive. Toutefois, par cette science mystique, les gens meurent ou deviennent fous. Dans le continent africain, des sacrifices humains sont exécutés pour divers motifs, quelquefois pour gagner beaucoup d'argent, avoir du travail, mais aussi pour le prestige. En réalité, lorsqu’on parle de sorciers dans ce contexte, on met en exergue le pouvoir d'une confrérie de personnes qui se réunissent toutes les nuits dans le spirituel pour décider du sort d'une tierce personne. C'est-à-dire qu’elles peuvent se réunir pour manger des âmes, d'où leur nom « mangeurs d'âmes ». C'est peu croyable dans ce contexte de modernité, mais les peuples d’Afrique y croient toujours. En 2004, en Côte d’Ivoire, des élèves de Terminale ont échappé au lynchage parce qu’ils avaient été accusés d'avoir mangé l'âme de trois de leurs enseignants, morts l’un après l’autre pendant l’année scolaire. En 2008, en République Démocratique du Congo, un cultivateur de Tshilenge, dans la province du Kasaï Oriental, a abattu un oiseau qui s'est étrangement muée en cadavre d'une vieille femme. Au Sénégal, une autre affaire étrange de sorcellerie a longtemps défrayé la chronique en 2010 dans le Sud du pays. Une femme d’un âge avancé a été sérieusement tabassée pour avoir voulu manger 47 âmes. Ces faits de société intéressent au plus au point les populations. Et l'Afrique aussi bien que l’Europe dissertent sur ces croyances à dormir debout qui peuvent être des mythes ou des réalités, selon la posture du moment.
La sorcellerie existe-t-elle ?
Les histoires de sorcelleries demeurent une réalité bien africaine. Pratique souvent assimilée à de la magie, la sorcellerie a toujours existé dans les sociétés traditionnelles. Le sorcier y est décrit comme une personne maléfique qui jette des mauvais sorts. C’est pourquoi, les personnes accusées de sorcellerie sont traquées. Elles sont souvent identifiées subjectivement à travers leur âge, leur comportement ou leur milieu social. Leurs traits physiques y contribuent également. Des individus sont considérés comme sorciers parce qu’ils sont vieux, isolés, le plus souvent abandonnés et marginalisés par la société. Certains présumés sorciers sont accusés à tort d’actes surnaturels alors qu’ils sont innocents. Du fait d’une vendetta aveugle, le plus souvent en zone urbaine, certains sont lynchés en public. Dans les pays africains, comme au Cameroun, certaines populations croient fermement à la sorcellerie. C’est d’ailleurs pourquoi, pour éviter les dérives, le code pénal camerounais réprime les pratiques de sorcellerie, dans son article 251 : « Est puni d'un emprisonnement de deux à dix ans et d'une amende de 5 000 à 100 000 francs celui qui se livre à des pratiques de sorcellerie, magie ou divination susceptibles de troubler l'ordre ou la tranquillité publique, ou de porter atteinte aux personnes, aux biens ou à la fortune d'autrui même sous forme de rétribution. » En somme, nos sociétés africaines sont plus qu'immergées dans ces croyances invisibles où la perception du surnaturel semble naturelle à tel point que le naturel devient surnaturel. La conséquence est que l’on cherche toujours à donner une explication irrationnelle à tout phénomène. Si certaines croyances invisibles ont permis d’équilibrer les sociétés africaines en les stabilisant, d'autres perceptions les ont par contre assujetties. Mais, le mystère est loin d’être entièrement percé.