Situé en Afrique de l’Est, la Tanzanie est l’un des rares pays africains à avoir un niveau de vie et une espérance de vie qui font la différence. Un niveau de vie sain avec des facilités d’accès à l’éducation et le développement de l’énergie éolienne, positionnent ce pays comme un sérieux prétendant à l’atteinte du développement durable. Dead line ? (pour parler comme les journalistes) : 2025.
Un projet ambitieux pour un peuple combattant et travailleur. C’est ainsi que l’on peut qualifier le projet de l’atteinte du développement durable par la Tanzanie en 2025. Pour y arriver deux secteurs clés de l’économie ont été ciblés : l’éducation et le développement de l’énergie éolienne. En effet, la Tanzanie est l’un des rares pays africains à avoir un taux de scolarisation avoisinant 100%. En 2010, lors d’une tournée qui l’avait conduite en Afrique, l’Administratrice du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Helen Clark témoignait : « Parmi les huit Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), l’objectif de l’éducation est un secteur dans lequel la Tanzanie a rencontré un grand succès en augmentant le nombre d’enfants qui vont à l’école, avec un taux de scolarisation qui va vers les 100%.» Selon elle, c’est un bénéfice considérable pour la nation entière : «Chaque dollar investi dans l’éducation des filles a un effet multiplicateur pour le développement dans tous les secteurs. Ce grand investissement dans l’éducation, la Tanzanie va en récolter les dividendes.» La Vision 2025 semble lancée pour de bon sur les côtes tanzaniennes où l’ouverture à la mer est un atout considérable. Cette Vision 2025 est en elle un concentré de stratégie élaborée en fonction des réalités du pays. Cette Vision de développement de la Tanzanie vise une excellente qualité de la vie pour tous les Tanzaniens grâce, entre autre chose, à la réalisation de l’éducation primaire universelle et à l’éradication de l’analphabétisme. Dans ce contexte, l’éducation est un facteur stratégique pour changer les attitudes et créer une nation éduquée, disposant du savoir et des compétences pour résoudre les défis auxquels le développement la confronte. La Vision souligne la nécessité de garantir que la science et la technique pénètrent à tous les niveaux de la société par l’intermédiaire de l’éducation des adultes et des campagnes publicitaires. Elle insiste en même temps sur le besoin d’une sensibilisation à leur mise en pratique pour la promotion et l’amélioration de la productivité, et la réduction de la vulnérabilité des gens à la pauvreté. Une méthode, appelée méthode « REFLECT » a été pensée pour être mise en oeuvre dans le domaine de l’éducation (Voir p25).
De l’éducation aux énergies renouvelables
Pour joindre l’utile à l’agréable, la Tanzanie compte développer son parc de production d’énergie éolienne. Dans le cadre de sa volonté de développer les secteurs éoliens, la Tanzanie cherche à produire 50 mégawatts à partir des turbines à air d’ici le début de l’année 2012 en vue de faire face à l’insuffisance de l’énergie hydroélectrique générée par les barrages et les stations thermiques. Un accord a été signé entre la société pour le développement national (NDC) et le groupe de l’Afrique de l’Est pour l’énergie (EAPP) qui permettra à la Tanzanie de voir ses générateurs d’énergie propre installés dans la région de Singida qui se situe dans le centre du pays pour un montant de près de 123 millions de dollars américains. Ce projet qui met du baume aux coeurs des Tanzaniens permettra de fournir d’ici quelques mois 50 mégawatts d’électricité. Une fierté pour les autorités qui, à travers le vice ministre du commerce et de l’industrie, Lazaro Nyalandu a traduit le bénéfice du projet : «Il va générer de l’électricité à bas prix comparé à l’énergie hydroélectrique et aux stations thermiques. Le début du chantier c’est-à-dire l’installation des turbines doit commencer en février 2011. Nous espérons que ce soutien supplémentaire permettra l’approvisionnement d’électricité à plus faible coût, contribuera à éliminer les fréquentes pannes d’électricité et à améliorer la sécurité de l’électricité. » La Vision 2025 remet la Tanzanie sur les rails. Le train est en marche.
L’ORIGINE DE L’APPROChE REFLECT
REFLECT est l’acronyme de «Regenerated Freirean Literacy through Empowering Community Techniques» (Alphabétisation freirienne régénérée par des techniques communautaires autonomisantes). Cette méthode repose sur la théorie de la conscientisation dont l’éducateur brésilien Paulo Freire fut le pionnier. Elle insiste sur l’importance du dialogue et de l’action, de l’accroissement de la sensibilisation, de la coopération et de l’autonomisation. Des apprenants adultes examinent les défis que pose le développement et cherchent les moyens d’y répondre. On se base sur ces questions pour les alphabétiser et leur enseigner le calcul. Les communautés sont également encouragées à faire usage de ces compétences pour générer des revenus et améliorer ainsi leurs moyens d’existence. Ce processus d’autonomisation donne l’occasion de discuter librement de n’importe quel sujet, y compris de questions délicates liées aux traditions culturelles. La tâche principale des animateurs consiste à entretenir le dialogue interactif.
La méthode REFLECT fut développée par Action Aid en 1993 et utilisée pour la première fois au Salvador (Amérique du Sud), au Bengladesh (Asie) et en Ouganda (Afrique). On l’emploie aujourd’hui dans plus de 60 pays pour s’attaquer à des problèmes dans les domaines suivants: agriculture, VIH/sida, résolution de conflits et construction de la paix. Développement de l’approche REFLECT en Tanzanie Juste après l’indépendance en 1961, le gouvernement adopta le Modèle d’éducation fondamentale dont le PNUD et l’UNESCO firent la promotion entre 1946 et 1964. L’éducation de base des adultes se limitait à l’acquisition de compétences en lecture et en écriture par autant d’apprenants que possible, sans toutefois tenir compte de leurs différents besoins, intérêts et traits caractéristiques. Au moment de l’indépendance, 85 % de la population (80 % des hommes et 98 % des femmes) ne savaient ni lire ni écrire (Nationalist Newspaper, 24 août 1967).
À la suite de la conférence de Téhéran qui s’était tenue en 1965, l’UNESCO lança conjointement avec le PNUD un programme expérimental d’alphabétisation fonctionnelle qui s’étendit de 1967 à 1972 et fut mis en place dans onze pays en voie de développement, y compris en Tanzanie, pour trouver les moyens les plus efficaces d’éliminer l’analphabétisme. Ce programme, une version modifiée du Modèle d’éducation fondamentale, partait du principe qu’il existait une corrélation positive entre l’alphabétisation et le développement socioéconomique.
Dans la pratique, l’alphabétisation fonctionnelle se bornait d’une manière générale à améliorer les qualifications professionnelles, et les aspects ayant trait au travail dans les programmes d’alphabétisation étaient liés à des questions prioritaires de la nation dans le domaine du développement socioéconomique. Les trois plans quinquennaux de développement de la Tanzanie (1961–1974) se consacrèrent par exemple largement à la productivité agricole, en particulier à la culture de rapport, sans tenir compte du fait que la majorité des gens était encore touchée par la pauvreté et vivait dans la misère. Les apprenants, essentiellement des femmes, se démotivèrent et abandonnèrent les cours.
En réponse à la conférence de Jomtien sur l’Éducation pour tous qui se tint en 1990 et à la suite des résultats des études menées au début des années 90 et de l’enquête nationale sur l’alphabétisation réalisée en 1992, qui révélaient que les activités d’éducation de base des adultes avaient pratiquement cessé, la Tanzanie se vit dans l’obligation de revoir l’approche de l’alphabétisation fonctionnelle. Le pays adopta le concept de l’UNESCO d’éducation de base des adultes pour répondre aux besoins de la population en la matière. Le gouvernement créa le projet d’éducation de base des adultes intégrée dans la communauté (ICBAE) en 1993 pour élargir l’accès à une éducation de base durable, destinée aux adultes et aux jeunes en rupture de scolarité. Il développa pour cela une approche communautaire axée sur l’apprenant. Quatre quartiers furent sélectionnés pour la phase pilote (Kiroka à Morogoro, Kishinda à Mwanza, Soni à Tanga et Sembeti à Kilimandjaro). Avec le soutien financier de la Banque africaine de développement (BAD), le projet d’éducation de base des adultes intégrée dans la communauté fut étendu à huit autres districts de Tanzanie: Masasi, Newala, Songea Rural, Tunduru, Nachingwea, Liwale, Biharamulo et Kigoma. Reconnaissant l’impact positif de la méthode REFLECT dans d’autres pays, la Tanzanie décida de l’adopter en 1998 dans les régions pilotes où le projet d’éducation de base des adultes intégrée dans la communauté avait été mis en place. La même année, Action Aid Tanzania entreprit un programme à long terme d’éducation communautaire intitulé «Éducation de base au niveau communautaire (Community Level Basic Education – CLBE) dans deux districts ruraux (Kigoma Rural et Liwale) de Tanzanie. Ce projet a été financé par le DFID (Département pour le développement international) et s’est déroulé sur quatre ans (de 1998 à 2002).