Avec la flambée du baril de pétrole, le biocarburant est sûrement une solution aux problèmes énergétiques de l'Afrique. Pourvu que les uns et les autres prennent le taureau par les cornes.
En titillant la barre des 100 dollars début janvier 2008 (un record dans l'histoire), le prix du brut a donné le tournis aux bourses. Autant Wall Street a paniqué et que les ménages africains ont tremblé, les pays producteurs de pétrole se sont frottés les mains. Le biocarburant s'est vu adouber et lorgner des yeux par les pays non producteurs d'or noir.
C'est le président sénégalais Abdoulaye Wade qui jette le pavé dans la marre. «Il faut créer une association de pays non producteurs de pétrole. Paradoxalement, grâce à la hausse du prix du pétrole, l'Afrique pourrait être le prochain grand fournisseur d'énergie propre au monde», a-t-il déclaré à l'ouverture d'une conférence ministérielle pour la création de l'Association des pays africains non producteurs de pétrole, à Dakar fin décembre.
Le biocarburant «peut sauver l'Afrique et le monde en lui évitant, après l'épuisement du pétrole attendu dans les quatre ou cinq prochaines décennies, de tomber dans le piège d'une généralisation du recours à l'énergie atomique», a enchaîné le président Wade, estimant que l'Afrique constitue «un réservoir d'énergie propre».
De l'autre côté de l'océan, aux alentours de la statue de la liberté, le géant Bill Gates a pris les devants dans le domaine des biocarburants en diversifiant ses sources d'énergies. L'homme d'affaires américain, l'une des plus grosses fortunes du monde a investi plus de 84 millions de $ US dans une société américaine de production d'éthanol! La vie appartient à ceux qui se lèvent tôt, dit l'adage populaire. Ainsi, si l'Afrique ne veut pas rester à la traîne dans la production et l'exploitation des énergies renouvelables, il lui faut se lever tôt.
25 % des besoins mondiaux en énergie
Les biocarburants risquent de peser lourd dans la balance énergétique mondiale. Si l'on s'en tient aux propos d'Alexander Muller, assistant du directeur général du Département de la FAO pour un développement durable, les biocarburants fournirons, d'ici une vingtaine d'années, plus de 25 % des besoins mondiaux en énergie. Enfin, ajoutons que beaucoup d'experts s'accordent à assurer que l'industrie africaine des biocarburants pourra créer une quantité considérable d'emplois, et «booster» économiquement les pays producteurs en les aidant à sortir de la pauvreté. Il est clair comme l'eau de roche que les biocarburants sont une panacée pour l'Afrique quand on sait que dans la plupart des pays, le litre d'essence coûte plus d'un euro. Dans cette lancée, le président sénégalais a proposé à la vingtaine de pays africains sur 42 non producteurs de pétrole présents à la rencontre de Dakar «de s'unir à l'image des pays de l'OPEP».
Qu'entendre par biocarburant …
On distingue généralement trois grandes catégories de biocarburants : l'alcool, les esters et les huiles végétales. L'alcool, également connu sous l'appellation de «bioéthanol», est produit par la fermentation du suc contenu dans les plantes riches en sucre (betteraves, topinambours, canne à sucre...), en amidon (pomme de terre, maïs, manioc) ou encore dans les plantes ligneuses (bois, paille...). Pour éliminer les difficultés techniques liées au stockage de l'éthanol, celui-ci est généralement converti par une réaction chimique en un éther dérivé de l'éthanol : l'ETBE (éthyl-tertio-butyl-éther). Les esters sont issus du mélange avec un alcool d'huile de graines oléagineuses (soja et colza par exemple). Le diester est en fait issu de la transformation des huiles végétales en question, selon une réaction physico-chimique appelée transestérification. Cette mutation chimique est l'étape indispensable pour obtenir un produit stable, homogène et de qualité régulière.
Les pétroliers exigent, en effet, des garanties sur le produit qu'ils incorporent dans leur gazole. Dans les usines, la graine de colza ou de tournesol est triturée pour en extraire l'huile, qui est ensuite partiellement raffinée avant d'entrer en réaction avec l'alcool méthylique (ou méthanol). Cette réaction génère un ester appelé «diester» ou «biodiesel» et de la glycérine. Un produit qui répond à la forte demande en produits d'origine végétale des secteurs de la cosmétique et de la pharmacie.
… et énergies renouvelables?
Energies vertes, le biogaz est l'énergie renouvelable issue de la fermentation des déchets organiques. Sa composition est similaire à celle des gaz naturels bruts. C'est un mélange de méthane, de gaz carbonique, d'azote et de gaz rares. Selon la nature des déchets traités et les variations climatiques, la composition du biogaz peut différer en proportion. On trouve ainsi à travers l'Afrique l'énergie hydraulique, éolienne, géothermique et solaire.
Aujourd'hui sur le continent, plusieurs pays expérimentent la recherche et l'exploitation du biocarburant, avec des résultants concluants, malgré l'insuffisance de ressources pour produire des quantités accessibles aux populations. Ainsi, le secteur privé doit s'investir afin que les bio-carburants profitent aux industries. Cela, de concert avec le politique qui doit créer les conditions idoines pour des investissements durables.