Article publié le 2011-01-20 par Par Daouda Emile Ouedraogo Editorial
Cap sur l’émergence [01/2011]
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Une année vient de succéder à une autre. Une nouvelle page s’ouvre pour les uns. C’est la continuité pour les autres. L’année 2010 a tiré sa révérence en faisant place à 2011. En Afrique, comme partout ailleurs, on met les bouchées doubles pour débuter cette nouvelle année avec entrain et surtout, partir du bon pied pour emprunter le langage des athlètes. Toute nouveauté est pleine d’incertitudes. 2011 l’est aussi pour les Africains. L’inconnu a toujours été une obsession. Sans être dans les secrets des dieux, 2011 sera une année charnière pour l’Afrique. Elle consacrera une option fondamentale pour les 53 pays du continent : celle de mettre le cap sur l’émergence de ces différents pays. Durant 2010, l’on aura attendu de nombreux pays, de nombreux dirigeants proposer de faire de leur patrie une nation émergente. Certains ont donné des délais de 15, d’autres 50 ans, etc. 2011 est donc l’année du lancement de l’émergence de l’Afrique. Cette émergence des pays africains est possible au vu de quelques acquis. Ces acquis prédisposent la majorité des pays africains à atteindre cet objectif. Le premier des acquis est la croissance économique. Excepté quelques poches de résistance, en 2010 la majorité des pays africains a enregistré un taux de croissance oscillant entre 6 et 8%. Le deuxième acquis est la prise en compte des réalités que le développement passe par le secteur privé d’où la création de conditions facilitant les investissements. Presque dans la majorité des pays africains, l’on peut créer une entreprise en une semaine. Le troisième acquis est la stabilité politique. L’Afrique, depuis quelques années est en train de résoudre ses crises avec ses méthodes. Même si la crise au Darfour perdure, il n’est pas moins important de préciser que les attaques contre les populations civiles et, les affrontements entre milices sont réduits à leur simple expression. Le quatrième acquis et non des moindres est la maîtrise de l’eau et la gestion de l’énergie. En 2010, de nombreux pays africains ont fait le choix des énergies renouvelables. On peut citer entre autres, le Maroc avec son parc d’énergie éolienne, le Burkina Faso avec le biocarburant créé grâce à la culture du jatropha, etc. L’Afrique est donc bien partie. Mais le pari n’est pas totalement gagné. L’un des sages d’Afrique, en l’occurrence le Pr Joseph Ki Zerbo, le premier africain agrégé d’histoire, militant du développement endogène disait qu’on ne se développe pas, mais on développe ; en ce sens que le développement, c’est dans la tête. Il le définissait ainsi : « Le développement, c’est le passage de soi à soi-même à un niveau supérieur.» Cette affirmation sous entend que le développement de l’Afrique passera forcément et indéniablement par un changement de mentalités. Il faut transformer les esprits et ouvrir nos espérances aux ambitions nobles et durables d’une existence pétrie et forgée vers le futur. Ce futur se forge par un assemblage de caractères et de pratiques qui répondent à la vision d’un monde nouveau. Il ne peut y avoir d’assemblage de caractère sans une vision commune des Africains. C’est ensemble que les pays africains atteindront l’émergence tant souhaitée. Pour l’historien Joseph Ki Zerbo, le développement se résume à une vision : « d’après ce que les historiens savent, disait-il, aucun peuple ne s’est développé uniquement à partir de l’extérieur. Si on se développe, c’est en tirant de soimême les éléments de son propre développement. En réalité, tout le monde s’est développé de façon endogène. Personne ne s’est installé sur la place publique en tendant sa sébile dans la main en attendant d’être développé. Si l’on voulait représenter par une figure géométrique ce type de développement idéal, il faudrait le voir comme une spirale ascendante ou comme le paradigme de l’arbre. L’arbre est enraciné, il puise dans les profondeurs de la culture sous-jacente, mais il est ouvert aussi vers des échanges multiformes, il n’est pas emmuré et scellé. Donc, c’est en étant profondément enraciné qu’on est prêt à toutes les ouvertures. Comme disait Aimé Césaire : « Poreux à tous les souffles du monde ». Car, lorsque le petit sud africain mangera à sa faim et que son semblable soudanais crèvera de faim ou croulera sous les balles assassines au Darfour, l’émergence serait un vain mot. Les défis et les enjeux de 2011 sur le continent sont identifiés. Reste à les relever de façon responsable et autonome. Dans cet ordre d’idée, en mettant le cap sur l’émergence, l’Afrique se donne pour option de réduire les inégalités sociales, de faciliter l’accès aux soins de santé, d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. Cela est faisable mais, pas sur un coup de bâton magique. Il faut d’abord poser les jalons et petit à petit, avec tact et précision faire monter l’édifice. Cela a déjà commencé, reste à poursuivre l’oeuvre. 2011 accueille l’Afrique les bras grands ouverts.