Article publié le 2008-11-09 par Résumé AFP par: Appolinaire Noël KOULAMA, Publié le: 25 septembre 2008 Afrique
Afrique du sud, Le nouveau président par intérim est élu par ses pairs de l’ANC. [11/2008]
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Samedi 20 septembre 2008, l’ANC a retiré sa confiance au président Mbeki, l’accusant d’instrumentaliser la justice pour barrer la route de la présidence à M. Zuma, qui lui a ravi en décembre la tête de l’ANC au cours d’un congrès houleux. Dès le lendemain, M. Mbeki annonçait sa démission lors d’une allocution radiotélévisée. Lundi 22 septembre 2008, l’ANC désignait son successeur, choisissant en M. Motlanthe une personnalité unanimement respectée, considéré comme le mieux à même d’assurer une transition en douceur. Ce jeudi 25 septembre 2008, M. Motlanthe est officiellement élu Président, jusqu’aux élections générales de 2009.

LE MODERE KGALEMA MOTLANTHE PREND LE POUVOIR

L’ex-président sud-africain Thabo Mbeki a cédé jeudi la place à un nouveau chef de l’Etat auquel il lègue, après neuf ans de pouvoir, un pays en proie à une crise économique, sociale et politique. A une minute après minuit, le mandat de Thabo Mbeki a pris fin. L’Assemblée nationale, dominée par le Congrès national africain (ANC), doit élire son successeur à 11H00 (09H00 GMT). Le modéré Kgalema Motlanthe a été élu jeudi 25 septembre 2008, président de l’Afrique du Sud par l’Assemblée nationale, après la démission forcée du chef de l’Etat Thabo Mbeki, renvoyé par son propre parti sur fond de dissensions internes. Sur les 360 députés présents, 269 ont voté en faveur de M. Motlanthe, le numéro deux du Congrès national africain (ANC) au pouvoir, a annoncé le président de la Cour constitutionnelle, Pius Langa, qui dirigeait la session parlementaire. 50 ont préféré le candidat de l’Alliance démocratique (DA, opposition), et 41 ont remis des bulletins blancs. Avant l’ouverture de la séance, les députés proches de Jacob Zuma, président de l’ANC et rival de M. Mbeki, ont chanté et dansé pour manifester leur liesse.

PRESTATION DE SERMON DE M. KGALEMA MOTLANTHE

Juste après son élection par l’Assemblée nationale, Kgalema Motlanthe a prêté serment : « Je jure que je serai fidèle à la République d’Afrique du Sud et obéirai, observerai, défendrai et protègerai la Constitution et les autres lois de la République », a-til déclaré lors d’une cérémonie officielle à Thuynhuys, la résidence présidentielle du Cap, la capitale parlementaire (sud-ouest). « J’accepte d’être le président élu de l’Afrique du Sud. Je suis profondément honoré par la foi placée en moi par les membres de l’Assemblée », avait auparavant déclaré Kgalema Motlanthe. « J’assume cette responsabilité pleinement conscient des devoirs et responsabilités attachés à cette haute fonction et des attentes que le peuple d’Afrique du Sud place à juste titre dans le président de la République », a-t-il ajouté.

PASSAGE DU POUVOIR SUR FOND DE CRISE

L’ex-président sud-africain Thabo Mbeki a cédé après neuf ans de pouvoir, un pays en proie à une crise économique, sociale et politique. Elu président en 1999, Mbeki avait pris la difficile relève du héros planétaire Nelson Mandela deux ans après avoir pris la tête de l’ultra majoritaire Congrès national africain (ANC). M. Motlanthe devrait former très rapidement son gouvernement, où le populaire ministre des Finances Trevor Manuel, considéré comme l’artisan de la croissance soutenue de l’Afrique du Sud post- apartheid, doit siéger. M. Motlanthe, connu pour sa modération et son calme, aura pour principale mission d’apaiser les rivalités internes à l’ANC en perspective des élections générales au deuxième trimestre 2009. Pour l’instant, il est prévu que le chef de l’ANC, Jacob Zuma, soit le candidat du parti à la présidentielle de 2009.

QUELLES SONT LES DIFFICULTES QU’ATTENDENT M. MOTLANTHE

M. Motlanthe devrait former très rapidement son gouvernement, où le populaire ministre des Finances Trevor Manuel, considéré comme l’artisan de la croissance soutenue de l’Afrique du Sud post- apartheid, doit siéger. Il est le troisième chef de l’Etat depuis l’avènement de la démocratie multiraciale en Afrique du Sud en 1994, après Nelson Mandela et Thabo Mbeki M. Motlanthe, connu pour sa modération et son calme, aura pour principale mission d’apaiser les rivalités internes à l’ANC en perspective des élections générales au deuxième trimestre 2009. Dans ce cadre volatil, Kgalema Motlanthe devra également lancer les prémices d’une réorientation sociale de la politique gouvernementale. L’Afrique du Sud, où 43% de la population vit toujours avec moins de deux dollars par jour en dépit de la croissance, connaît des tensions sociales de plus en plus perceptibles. L’immense pauvreté des masses coexiste avec l’opulence d’une nouvelle classe dirigeante, qui s’arroge les bénéfices d’une politique de discrimination positive visant en principe à corriger les inégalités héritées de l’apartheid. Juste après son élection, le candidat de l’opposition, Joe Seremane, a exhorté le nouveau président à “agir avec célérité pour calmer les craintes tant internationales que nationales”, en formant le gouvernement qui dirigera le pays jusqu’aux élections générales du 2e trimestre 2009. “Ce pays a urgemment besoin d’une direction résolue et forte, qui réduise la profonde anxiété générée chez de nombreux d’entre nous par les combats internes au sein du parti au pouvoir”, a-t-il ajouté, suscitant une approbation de la tête du chef de l’Etat.

QUELLES ETAIENT LES DIFFICULTES RENCONTREES PAR MBEKI ?

Mbeki avait su gagner le respect des investisseurs internationaux en menant l’économie sud-africaine à une croissance soutenue. Il a aussi contribué à rendre aux Africains fierté et responsabilité dans la gestion des crises continentales, participant lui-même aux accords de paix au Burundi ou en Côte d’Ivoire et, tout récemment, arrachant un accord de partage de pouvoir au vieux président zimbabwéen Robert Mugabe. Mais il n’a pas su gérer un mécontentement croissant vis-à-vis de sa politique sociale. En juillet, l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) dénonçait l’échec de l’Afrique du Sud démocratique à corriger les inégalités héritées de l’apartheid. “La population noire continue de souffrir de manière disproportionnée du chômage, de la pauvreté et d’un accès inégal à l’éducation”, constatait l’OCDE. Depuis l’instauration de la démocratie en 1994, l’Afrique du Sud a connu une croissance sans précédent, dépassant 5% en 2004. Mais le chômage, qui ne touche que 4% des Blancs, s’élève à 23% (personnes cherchant activement un emploi). Avec 43% des 48 millions de Sud- Africains vivant avec moins de deux dollars par jour, les frustrations montent. Régulièrement, les habitants des townships manifestent leur colère. La xénophobie fleurit. En mai, elle a explosé dans les quartiers pauvres de la capitale économique, Johannesburg. Plus de 60 personnes ont été tuées dans une vague de violences contre les étrangers, accusés de prendre les emplois et d’attiser la criminalité. Mbeki a mis plus d’une semaine à réagir et récusé les arguments de ceux qui l’invitaient à s’attaquer aux racines du problème. Incapable d’accepter la critique “qu’il prend comme une insulte personnelle” selon l’ancien député de l’ANC Andrew Feinstein, l’ex- président rejetait la réalité d’une criminalité qualifiée d’”inacceptable” par ses pairs d’Afrique. Le pays détient le 2e plus haut taux de meurtres au monde, avec 50 personnes tuées chaque jour. Les viols et vols avec violence sont particulièrement nombreux. Mais les membres de l’Union africaine (UA) qui dressaient ce constat en 2007 sont, pour lui, victimes d’”une perception populiste”. De même s’est-il enfermé dans le déni face à la pandémie de sida, faisant prendre des années de retard à la distribution de médicaments antirétroviraux (ARV) à l’écrasante majorité de la population qui dépend du système public. Ceux qui prônent la prévention, “convaincus que nous (les Africains) sommes des dissolus porteurs de microbes (...), proclament que notre continent est condamné à la mort à cause de notre irrépressible dévotion à la chair”, assénait-il en 2001. Son gouvernement a fini par lancer en 2007 un programme cohérent d’ARV. Mais plus de 5 millions de Sud-Africains sont contaminés. Ils étaient 850.000 en 1995. Même la croissance est aujourd’hui menacée. En janvier éclatait une crise énergétique qui aurait pu être prévenue: un rationnement de l’électricité a obligé les mines d’or, principale source de revenus du pays, à fermer temporairement. Depuis dix ans, l’opérateur public d’électricité Eskom réclamait d’investir dans de nouvelles infrastructures.

CONCLUSION

Selon M. Madiba : « Une des tentations qui guettent un dirigeant élu sans opposition est d’utiliser cette position de pouvoir pour régler ses comptes avec ses détracteurs ». L’ANC est aujourd’hui déchiré par des luttes intestines auxquelles une gestion autoritaire a largement contribué. “Ce leader paranoïaque et sans pitié” a fait le vide autour de lui et “entraîné sa propre chute”, estimait le quotidien The Star après que le parti eut démis samedi le chef de l’Etat Thabo Mbeki.