S’il est un terme qui fait le lit des programmes et des projets de développement, c’est bel et bien le développement durable. Au XIXe siècle, on l’emploie à temps et à contre temps autour des tables rondes, d’une tasse de thé au dessus d’un feu de charbon ou des dîners de gala des sommités, au bord d’un carrefour. Ironie du sort ou ignorance souvent, les chantres de cette pratique ne savent pas qu’en utilisant le charbon, ils sont aux antipodes de la lutte quotidienne des nations pour atteindre le développement durable. Mais bref ! Souvent c’est le revers de la médaille du «matraquage médiatique». Les pays en voie de développement sont experts en la matière, aidés en cela par les institutions de Bretton Woods. Dans ce flot, on a vu passer le «cadre stratégique de lutte contre la pauvreté», les programmes «epsi millénaire», «quinquennal», «décennal», etc. Si les ambitions nourries par cette flopée d’outils sont louables, il n’en demeure pas moins qu’ils sont souvent des dossiers «bien montés mais mal ficelés». Il y a lieu de faire une halte et de réfléchir froidement à ces situations. Le développement durable est une aspiration profonde. Si l’on se réfère au seul mot de «développement », il est un tout. Il va au delà de l’aspect monétaire et matériel. Le premier africain agrégé d’histoire, le Pr Joseph Ki Zerbo est explicite: «le développement, ce n’est pas l’addition des choses produites ou à produire, mais une multiplication, un multiplicateur des choix pour le maximum de personnes qu’il rend parties prenantes du pouvoir, de l’avoir et du savoir». A travers cette citation, il n’y a pas de développement si «le pouvoir, l’avoir et le savoir» ne sont pas réunis. Le savoir rend libre. La liberté conditionne le pouvoir de décision. L’avoir rend apte à se soigner, se vêtir, subvenir à ses besoins. Au niveau d’une nation ou d’un peuple, le développement peut être perçu comme la capacité individuelle et collective à relever les défis de l’existence dans le temps et l’espace. Lorsqu’on ouvre cette conception à la durabilité du «pouvoir, l’avoir et le savoir» on y ajoute le développement des sociétés de façon équitable et la protection de l’environnement. Aujourd’hui, avec l’avènement des changements climatiques, le développement durable ne doit plus être perçu comme une simple notion ou encore un sujet de débat des intellectuels. En 1987, le rapport Brundtland de la Commission mondiale sur l’environnement définissait le développement durable comme «un développement qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de «besoins», et plus particulièrement, des besoins essentiels des plus démunis à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. L’Afrique est le continent le moins pollueur de toute la planète. Étant le plus petit pollueur de la planète, il demeure le continent le plus durement frappé par les conséquences des changements climatiques. Selon une étude de la Banque mondiale publiée en fin septembre dernier, les pays en développement auront besoin de 75 à 100 milliards de dollars américains par an, entre 2010 et 2050, pour s’adapter aux conséquences des changements climatiques. C’est un besoin réel. Cependant, l’Afrique aux immenses richesses doit pour une fois au moins refuser de tendre la main et, par un sursaut d’orgueil, entamer son développement de manière endogène. Le salut de l’Afrique viendra de ce changement d’option et de nulle part ailleurs.