L’Afrique est au cœur des enjeux de la mondialisation. Flux des capitaux, marchés vierges à découvrir et à exploiter, l’Afrique constitue le terreau fertile pour donner un élan substantiel à la mondialisation. Il ne s’agit pas, par cet écrit, de fustiger la mondialisation, car, quoi que l’on dise ou pense, l’Afrique ne peut être en marge de la mondialisation. À cet effet, il faut analyser avec froideur les apports de ce riche continent dans le processus de concrétisation d’une mondialisation à visage humain. Cette mondialisation appelle à s’inspirer des modèles réussis de développement dans les continents qui ont approximativement la même physionomie que l’Afrique. Alassane Dramane Ouattara, l’actuel président de la Côte d’Ivoire, faisait la parallèle entre les États africains et ceux asiatiques, lors d’une conférence qu’il animait étant Directeur général adjoint du Fonds monétaire international. Le séminaire portait sur «L’Afrique, la mondialisation et le développement : risques et enjeux», organisé par l’Association des Amis de Passages (ADAPes) et le Centre français du Commerce Extérieur (CFCE). Il disait : «L’Asie de l’Est a largement démontré, pendant la plus grande partie des trois dernières décennies, les avantages de la mondialisation et les bienfaits de l’ouverture et de la libéralisation économique. Grâce à des politiques budgétaires prudentes, à des investissements substantiels en capital et en ressources humaines et aussi à l’ouverture de leurs économies, ces pays ont enregistré une croissance économique impressionnante et connu des avancées enviables dans la lutte contre la pauvreté». En clair, l’Afrique a sa place dans le processus de mondialisation de l’économie. De nombreux facteurs contribuent à étayer cette affirmation. L’Afrique subsaharienne a accompli des progrès considérables dans la stabilisation macroéconomique ces dix dernières années. Le plus encourageant, dans ce retournement de situation, c’est qu’il est le fruit d’efforts résolument déployés par un nombre croissant de pays pour conduire une politique financière saine et mener à bien les réformes structurelles qu’appelle l’économie de marché. Leurs efforts ont été appuyés par la communauté internationale et notamment le Fonds Monétaire International (FMI), qui ont apporté à ces pays assistance technique et appui financier dans le cadre de la facilité d’ajustement structurel renforcée (FASR). Quelques chiffres clés permettront d’illustrer cette «renaissance» économique de l’Afrique. Après des années de stagnation, la croissance économique réelle de l’Afrique subsaharienne est passée, en moyenne, d’environ 1 % en 1992 aux alentours de 5 % en 1997 et devrait rester sur cette voie de croissance positive. L’accélération de la croissance a touché par ailleurs de plus en plus de pays : si 18 seulement des 47 pays de la région affichaient une croissance supérieure ou égale à 3 % en 1992, ils étaient en effet 32 dans ce cas en 1997. Après s’être contracté pendant cinq ans d’affilée, le PIB réel par habitant a commencé à se redresser et, désormais, 40 des 47 pays de la région voient leur revenu par habitant progresser. En outre, des succès ont aussi été enregistrés dans la lutte contre l’inflation. Bon nombre de pays africains ont d’ores et déjà ramené celle-ci en deçà de 10%, et l’inflation moyenne pour l’ensemble de la région — mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) — est passée, selon les estimations, du sommet de 60 % atteint en 1994 à 22 % en 1997. Les pays africains ont également réduit, au total, leurs déséquilibres intérieurs et extérieurs. D’autre part, le FMI et la Banque Mondiale ont commencé récemment à mettre en œuvre une initiative conçue pour venir en aide aux pays pauvres et très endettés (PPTE) en s’efforçant, notamment, d’alléger le lourd fardeau de leur dette multilatérale. Jusqu’à présent, sept pays, dont cinq africains — le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Mozambique et l’Ouganda —, ont été admis à bénéficier de cette Initiative en faveur des PPTE. Les gouvernements africains ont aussi progressé très sensiblement dans l’ouverture de leurs économies au commerce mondial. Il faut noter, à cet égard, que trente et un pays d’Afrique subsaharienne ont accepté — pour la plupart depuis 1992 — les obligations qui découlent de l’article VIII des Statuts du FMI, et qui consistent à renoncer à l’imposition de restrictions aux paiements et transferts afférents aux transactions courantes. Enfin, la restructuration de bon nombre d’économies africaines s’accélère. À travers le continent, l’interventionnisme économique de l’État recule : les contrôles des prix sont levés et la commercialisation des produits agricoles est de plus en plus libéralisée. La restructuration et la privatisation des entreprises d’État sont maintenant engagées dans la plupart des pays africains, quoi qu’à un rythme inégal et avec des fortunes diverses. De même, les marchés du travail sont peu à peu libéralisés.
Les enjeux de la mondialisation sont énormes pour l’Afrique. Mais elle a déjà enclenché une marche glorieuse vers son émancipation. Comme le disait un penseur anonyme : « la mondialisation a poussé les pays riches à se concentrer sur les produits à forte valeur ajoutée, ils ont alors pris conscience que la richesse n’était pas dans les bras mais dans les cerveaux ».