L’évolution de l’agriculture sur le continent appelle à la création de nouveaux espaces et de modes de production. Les systèmes de production, de par leur diversité doivent contribuer à bâtir les fondements d’une agriculture pérenne et ambitieuse. L’Afrique agricole se réveille.
L’Afrique est un continent agricole à plus de 90 pour cent. Dans sa région subsaharienne, le développement de l’agriculture a été une bonne option pour l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire. Pour plus d’efficacité dans le rendement agricole, plusieurs systèmes de production ont été mis en chantier avec des résultats et des fortunes diverses.
Bref aperçu de la région agricole subsaharienne
Cette région regroupe 626 millions d'habitants dont 61 pour cent (soit 384 millions) travaillent dans l'agriculture. La superficie totale des terres émergées est de 2455 milliards d'hectares dont 173 millions cultivés (cultures annuelles et pérennes), soit le quart de la superficie potentiellement exploitable. Les zones arides et semi-arides constituent 43 pour cent de la superficie totale. En Afrique de l'Ouest, 70 pour cent de la population totale vit dans les zones humides et sub-humides tandis qu'en Afrique de l'Est et australe, seule la moitié de la population occupe ces terres. 15 systèmes de production ont été identifiés en Afrique. Vu le nombre de ménages agricoles qui peuvent appartenir à un système de production, il est inévitable de retrouver une forte hétérogénéité dans les plus grands systèmes et plusieurs sous-systèmes peuvent être identifiés dans ce cas. Les cinq systèmes les plus importants en termes de population, de pauvreté et de potentiel de croissance sont disséminés un peu partout en Afrique.
Le système irrigué et le système arboricole
Le système irrigué. Il regroupe des grands périmètres irrigués couvrant 35 millions d'hectares pour une population agricole de 7 millions d'habitants. La culture irriguée est renforcée par des cultures pluviales ou par l'élevage. La maîtrise de l'eau est totale ou partielle tandis que la taille des exploitations va de 22 hectares par ménage dans le périmètre de Gezira à moins de 1 hectare. Le risque d'échec total de culture n'existe pratiquement pas mais le revenu des exploitants est sensible aux pénuries d'eau, à la détérioration des structures d'irrigation et au déséquilibre entre les coûts des intrants et les prix des produits. La plupart des périmètres sont aujourd'hui confrontés à des crises mais si les problèmes d'ordre institutionnel sont résolus, le potentiel de croissance agricole futur est garanti. L'incidence de la pauvreté est plus faible que dans les autres systèmes de production et le nombre de pauvres en termes absolus est réduit.
Quant au système arboricole, l'aire d'extension de ce système s'étend dans la zone humide de l'Afrique de l'Ouest et du Centre et occupe 73 millions d'hectares pour une population agricole de 25 millions d'habitants. Les terres cultivées couvrent 10 millions d'hectares (6 pour cent), dont seulement 0,1 million est irrigué. Ce système est organisé autour de la culture de produits industriels tels que le cacao, le café, le palmier à huile et l'hévéa. Les cultures vivrières intercalaires servent principalement à l'autoconsommation. L'élevage de bovins est limité. On y rencontre également des plantations industrielles (palmiers à huile et hévéa notamment), ce qui offre divers services aux petits exploitants à travers des plantations pilotes ou des contrats de collecte de récolte. L'incidence de la pauvreté est faible à modérée et se limite aux très petits exploitants et travailleurs agricoles.
Le système de production mixte céréales-cultures à racines et celui axé sur le maïs
Ce système s'étend à travers la zone sub-humide sèche d'Afrique de l'Ouest jusqu'en Afrique centrale et australe. La superficie totale est de 312 millions d'hectares pour une population agricole de 59 millions. Les terres cultivées sont estimées à 31 millions d'hectares dont seulement 0,4 million en irrigué. L'élevage de bovins y est pratiqué de manière extensive, avec quelque 42 millions de têtes de bétail. Bien que le maïs, le sorgho et le mil soient communément cultivés, les tubercules tels que l'igname et le manioc ont une part prépondérante. La pratique de l'association culturale est courante et une large gamme de spéculations est cultivée et commercialisée. La principale contrainte est la sécheresse. L'incidence de la pauvreté est faible et les perspectives de croissance agricole sont excellentes. La zone abritant ce système pourrait devenir le grenier de l'Afrique et constituer une importante source de recettes d'exportation.
Pour le maïs, il s'agit du système de production alimentaire prépondérant en Afrique de l'Est et australe; il s'étend à travers les zones de plateaux et de hauts plateaux de 800 à 1 500 m. La superficie totale est de 246 millions d'hectares pour une population agricole de 60 millions d'habitants. Les terres cultivées sont de l'ordre de 32 millions d'hectares dont seulement 0,4 million sous irrigation. La culture vivrière est le maïs tandis que les principales ressources monétaires proviennent des montants envoyés par les migrants, du bétail, des petits ruminants, du tabac, du café, du coton et la vente de cultures vivrières telles que le maïs et les légumineuses à grains. L'élevage compte 36 millions de bovins. Ce système connaît actuellement une crise dans la mesure où l'utilisation des intrants a fortement baissé du fait d'une pénurie de semences, d'engrais et de produits agrochimiques, associée aux prix élevés des engrais par rapport au prix du maïs. La sécheresse et l'instabilité des marchés sont les principales contraintes. On note dans cette région peu de pauvreté chronique. En dépit de la crise actuelle qui l'affecte, les perspectives de croissance agricole à long terme y sont relativement bonnes et le potentiel de réduction de la pauvreté élevé.
Le mil et le sorgho
Le système agropastoral axé sur le mil et le sorgho est pratiqué dans les zones semi-arides de l'Afrique de l'Est et sur de larges surfaces en Afrique de l'Est et australe. La superficie totale est de 198 millions d'hectares avec une population agricole de 33 millions d'habitants. La superficie cultivée est de 22 millions d'hectares et la pression exercée sur les rares terres arables est très forte. L'agriculture et l'élevage y revêtent pratiquement la même importance. Le sorgho pluvial et le petit mil sont les principales sources d'alimentation tandis que le sésame et les légumineuses à grains sont parfois commercialisés. On y compte 25 millions de bovins, ainsi que des ovins et des caprins. La sécheresse y constitue la principale cause de vulnérabilité et la pauvreté est fréquente et quelquefois chronique. Malgré que le potentiel de réduction de la pauvreté soit moyen, il n’en demeure pas moins que ce système est l’un des plus usité sur le continent.