Alors que vont bientôt résonner les cymbales de la Coupe du Monde de football au Brésil, événement sportif le plus populaire de la planète, il est utile de faire un arrêt sur une discipline sportive qui ne charrie plus seulement le jeu, mais force l’enjeu.
Le foot, c’est un truisme, n’est plus l’affaire des seuls footballeurs. Ses enjeux ont largement débordé le cadre des stades et des pelouses. Il existe désormais une florissante industrie du pied dont l’influence va chaque jour s’accroissant. Les footballeurs, capitaines de cette nouvelle industrie, sont des enfants gâtés qui ont un train de vie d’émirs. Riches comme Crésus, aussi populaires que des rocks stars, ce sont d’authentiques héros du 21e siècle qui sont courtisés jusqu’au sommet des États.
La Coupe d’Afrique des Nations qui s’était déroulée en 2012 en Afrique du Sud, fut la parfaite illustration de la place centrale que le football occupe de plus en plus dans la vie économique en particulier, et dans la vie des nations africaines, en général.
La Coupe du Monde qui était aux origines un pur rendez-vous sportif, s’est transformée au fil des ans, en une grosse affaire de sous. Le jeu a été supplanté par l’enjeu. Des businessmen se sont jetés depuis des années comme des loups affamés sur la manne du football. Les retombées sont gigantesques. Les milieux du sponsoring et des droits télévisés sont les principaux bénéficiaires de cette grand-messe sportive. Pour ne prendre qu’un exemple parmi tant d’autres, en termes de droits télévisés, chaque pays qualifié à la dernière Coupe d’Afrique de Nations, s’était acquitté de près de 700 millions de FCFA, tandis que les pays non qualifiés ont déboursé la moitié de cette somme.
Retombées conséquentes
Au niveau des pays organisateurs, les retombées ont été assez conséquentes. Car l’organisation de la compétition a nécessité la construction d’infrastructures qui ont malgré tout renforcé le potentiel des pays organisateurs après l’événement. Grâce au flux de visiteurs estimé à plus d’1 million de personnes, les stades, les hôtels, les aéroports, le commerce, les routes, etc., créés à la faveur de la CAN, sont susceptibles d’être des facteurs qui pourraient notamment doper le secteur touristique de la Guinée Équatoriale et du Gabon.
À l’échelle de l’instance faîtière du football mondial, la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) verse en moyenne 1 milliard de FCFA à chaque fédération dont l’équipe fanion est qualifiée pour la phase finale. La Coupe du Monde devient ainsi une sorte de grand casino dont les machines à sous retentissent à chaque mise.
La grande fête du football mondial, c’est aussi l’occasion pour les dirigeants, de donner de la visibilité à leurs pays du fait de l’exceptionnelle mobilisation médiatique autour de l’événement. Des sources ont annoncé le chiffre pharaonique d’1 milliard de téléspectateurs pour la CAN 2012! Il faut voir ce chiffre doublement ou triplement à la hausse pour ce qui est de la Coupe du Monde du Brésil. Les annonceurs ne sauraient donc être indifférents à ce qui s’apparente à un grand marché fructueux.
Investir au pays
Les footballeurs, parmi ceux qui ont le plus réussi, ont opté d’investir et de s’investir dans le circuit économique de leurs pays. C’est le cas de Samuel Eto’o qui a créé une entreprise (Eto’o télécoms) qui évolue dans le champ de la téléphonie mobile. Même si la mayonnaise tarde à prendre, le Lion Indomptable est déterminé à développer ses talents dans les affaires. Au Gabon, il est associé au Président Ali Bongo Ondimba dans des projets à caractère socio-économique.
Le cas Didier Drogba est plus symptomatique des footballeurs qui veulent jouer sur le terrain de l’investissement. Le désormais légendaire attaquant des éléphants de Côte d’Ivoire, a pris des actions dans une entreprise engagée dans l’exploitation de l’or. Cette année, il a été désigné par le magazine économique américain People With Money parmi les footballeurs les mieux payés au monde. En effet, entre avril 2013 et avril 2014, il aurait engrangé 96 millions d’euros (près de 63 milliards de FCFA).People With Money s’appuie sur les gains directs mais aussi sur les revenus liés aux partenariats publicitaires, et aux investissements divers.
Au total, les avoirs de Didier Drogba s’élèveraient selon la même source, à 275 millions d’euros (environ 180 milliards de FCFA). Il est présent dans des secteurs divers : contrat publicitaire avec les cosmétiques CoverGirl. Il posséderait plusieurs restaurants à Abidjan (dont la chaîne « Chez l’gros Didier »), un club de Football à Abidjan, une ligne de vêtements Drogba Séduction, un parfum L’eau de Didier...
Le bonheur des autres
Sur le plan purement sportif, les dirigeants des plus grands clubs du monde ont pour les footballeurs africains, des yeux de Chimène. Les joueurs africains font le bonheur des championnats italien, espagnol, français, anglais, turc, japonais, qatarien, chinois, sud-américain, etc. Naturellement doués, les footballeurs africains se vendent au plus offrant en Europe, en Asie et en Amérique.
En ce qui concerne le jeu proprement dit, il faut, sans nier le talent des footballeurs africains d’aujourd’hui, souligner que leurs aînés étaient plus qu’exceptionnels. Abédi Pelé, JayJay Okocha, Youssouf Fofana, Roger Milla, Théophile Abéga, Thomas Nkono, Belloumi, Rabah Madjer, Opoku Nti, Bocandé, Salah Assad, Abdelgani, etc., étaient des pépites d’or. Ils jouaient pour le plaisir et pour la beauté du geste. Ils jouaient pour le foot-roi et non pour l’argent-roi. Ils avaient quelque chose de ronaldien et de zidanien par leur incomparable toucher de balle, par leur vision exceptionnelle du jeu, par leur le génie créateur unique. Avec eux le football était un régal. Robert, l’ex-international français, disait à juste titre, de son coéquipier de l’équipe de France, une chose simple et juste : « Quand Zidane te fait une passe, il met du chocolat dessus. » Cette jolie remarque va aussi comme un gant à tous ces génies précités.
En comparaison, Samuel Eto’o, Didier Drogba, Yaya Touré, Adébayor, Obi Mikel, Gyan Assamoah, Salomon Kalou, Jonathan Pitroapa, Pierre-Aymerick Aubameyang, etc., sont trop conventionnels. Mais ils n’en demeurent pas moins des diamants purs.
Il reste un point noir dans ce beau tableau : le racisme. Malgré les efforts déployés par les instances du football mondial, il y a encore des énergumènes qui jettent des doigts de banane aux footballeurs africains en particulier, et aux footballeurs à la peau basanée en général. Il y a malheureusement encore des énergumènes au 21e siècle qui ne comprennent pas que tout homme, quelle que soit la couleur de sa peau, descend du singe. La meilleure réponse à donner à tous ces racistes, serait peut-être de gagner la Coupe du Monde…