Les autorités politiques et administratives d’Ouganda ne badinent pas avec la propreté de la capitale Kampala. L’une des mesures prises à cet effet est d’emprisonner tous ceux qui se hasarderaient à salir la ville. Des mesures draconiennes.
C’est sérieux ! Ne rions pas. En Ouganda, on emprisonne pour rendre la ville de Kampala propre. En effet, le 1er janvier de cette année, 40 personnes ont été interpellées pour avoir jeté des ordures dans la rue. Trois jours plus tard, ce sont 20 personnes que la police mettait aux arrêts pour les mêmes accusations. Votée en 2000, cette loi appelée Solid Waste Management Ordinance incite à arrêter tout individu aperçu en train de jeter des déchets. Et, ce n’est qu’en 2012 que les autorités ont décidé d’appliquer la loi. Pour une première en Afrique, c’en est une. En décidant d’appliquer cette loi votée il y a une dizaine d’années, les autorités d’Ouganda veulent mettre de l’ordre dans le désordre insalubre dans lequel les populations de la capitale, Kampala, voulaient s’installer. Selon Peter Kawuju, le responsable de la communication de la Kampala Capital City Authority (KCCA) dont les propos sont rapportés par BBC, «les gens jettent des ordures partout, notamment dans les rigoles (petit canal creusé pour faire écouler l’eau). Cela provoque une obstruction des canalisations, ce n’est pas hygiénique». La propreté des lieux tient à coeur les autorités, d’où la prise de mesures draconiennes pour venir à bout de ce phénomène. Les maladies liées au manque d’hygiène ne se comptent plus du bout des doigts. Elles tuent des milliers de personnes par an sur le continent. La malaria, la maladie des mains sales, les odeurs pestilentielles qui endommagent le foie, celles qui provoquent des difficultés respiratoires sont autant d’éléments qui desservent les ordures sous nos cieux. Il faut donc apprivoiser la bête et la rendre non nuisible à la santé humaine. Pour cela, Kampala n’y est pas allée de main morte en infligeant des peines allant de l’emprisonnement aux amendes en passant par les travaux d’intérêt commun. On ne saurait le dire assez, lutter contre les ordures ménagères, solides ou liquides, celles des déchets industriels est un impératif dans une société qui a pour ambition de rallonger l’espérance de vie de ses populations. Pour ce faire, la peine maximum pour un individu surpris en train de jeter des ordures est de deux mois d’emprisonnement, 20 heures de travaux d’intérêt général et une amende de 40.000 shillings ougandais, soit 12 euros. De quoi faire ravaler la langue à ceux qui se risqueraient à balancer les ordures dans les rues ou dans les caniveaux.
Une lutte sans merci
C’est une lutte sans merci que les autorités de Kampala livrent aux pollueurs de tous ordres. La question qui se pose est de savoir si ces mesures, aussi drastiques soient-elles, parviendront à faire entendre raison aux Kampalais. La première des choses que ces derniers doivent comprendre est que cette lutte n’est pas unilatérale. Elle consiste à donner un environnement propre aux populations, à préserver leur santé et à favoriser un épanouissement général de la société. Il n’est pas sous-entendu que les bénéfices de cette lutte ne pourront pas profiter aux Kampalais. Ils en sont les premiers bénéficiaires ; la lutte doit donc impliquer tout le monde. Le citoyen lambda, les autorités coutumières, religieuses et administratives doivent s’impliquer dans cette lutte pour faire cause commune contre les déchets qui pourrissent la vie de la cité. A Kampala, la mesure ne semble pas faire l’unanimité dans la mesure où elle ne favorise pas l’exercice de ceux qui étaient habitués à cette pratique. Selon le quotidien ougandais New Vision qui rapporte les propos d’un habitant de la capitale, l’idée est bonne mais, pas l’approche : «l’idée d’avoir une ville propre est bonne mais je pense que l’approche n’est pas correcte. Il y a beaucoup de lois que les gens ne connaissent pas. Vous pouvez au moins leur dire que celle-là va être imposée». Selon le même journal, ces propos sont recadrés par ceux d’une riveraine qui est pour l’application de la mesure. «Ils devraient être arrêtés et faire leur travaux d’intérêt général», a-t-elle professé.
Autres lieux, autres méthodes
Dans certaines capitales du continent, les autorités ont adopté de toutes autres méthodes. A Ouagadougou, par exemple, la municipalité a recruté des vieilles femmes pour balayer les rues de la capitale très tôt le matin avant le lever du jour. Dès 4 h du matin, on peut apercevoir ces femmes, accroupies dans les différentes artères de la ville pour les rendre propres. Cette pratique a permis à la capitale de recevoir le prix de l’une des villes les plus propres d’Afrique. Mieux, le premier responsable du pays a procédé au lancement, il y a deux ans, d’une vaste campagne d’hygiène par le lavement des mains avant toute activité nourrissante. Cette campagne d’hygiène publique a eu pour effet de sensibiliser la frange jeune sur la nécessité de se laver les mains au savon avant de passer à table ou après être allé à selles. Ici, on n’emprisonne pas, mais la mesure ne semble pas avoir donné les résultats escomptés comme c’est le cas en Ouganda. Donc, tout est question d’approche.