L’année écoulée a été une année difficile pour le continent africain. Grèves, mouvements sociaux, « révolutions arabes », ont fait les choux gras de la presse. Et, pourtant, à côté de ces manifestations, 2011 a été une année bien remplie en Afrique. Entre autres aspects, la mise en exergue de la solidarité africaine, la promotion de la bonne gouvernance et, l’économie qui prend de l’envol malgré la crise.
Les crises qui ont secoué le continent durant l’année écoulée ont montré aux Africains la nécessité de revitaliser l’une de leurs valeurs cardinales : la solidarité. Dans la corne de l’Afrique, des images d’enfants chétifs, d’hommes errants, ne sachant à quelle bouée de sauvetage s’accrocher pour avoir un bol de riz, ont fait le tour des médias internationaux. A force de rabâcher ces images néfastes sur l’Afrique, des médias donnent souvent l’impression que l’Afrique est une terre sauvage empêtrée dans les circonvolutions d’un misérabilisme sans fin. Or, il n’en est rien. Dire que la famine n’a pas existé dans la corne de l’Afrique, c’est insulter la conscience et la dignité de ces hommes et femmes qui ont péri de la faim. Cependant, l’existence humaine semble avoir été déshumanisée par le traitement malsain de la famine dans la corne de l’Afrique. On a voulu nier l’identité des Africains. On a voulu nier la capacité des populations africaines à se prendre en charge. Les médias ont mis en exergue les secours internationaux, faisant fi du soutien moral que les Africains ont apporté à leurs frères de la Somalie, de l’Éthiopie et du Kenya. Dans presque tous les pays, des appels ont été lancés pour sauver les « enfants de cette partie du monde ». Main dans la main, dans le silence de leur coeur, sans tapage, ni fioritures, des hommes et des femmes, anonymes ont apporté leur secours. C’est l’expression pleine et entière de la solidarité « à l’africaine ». Cette crise de la faim a fait perdre de vue l’Afrique de la vitalité, du savoir traditionnel et ancestral ; l’Afrique de la gaieté et de « l’ambiance à ciel ouvert ». On a connu aussi, en 2011, l’Afrique sociale, l’Afrique de la bonne gouvernance, l’Afrique du « business », l’Afrique de la créativité et des initiatives. Cette année, comme tous les ans, la Fondation Mo Ibrahim, spécialisée dans « la mesure » de la bonne gouvernance en Afrique a publié son rapport. Ce rapport montre les avancées et les difficultés dans la promotion de la bonne gouvernance sur le continent. Mais qu’est-ce que l’indice Mo Ibrahim ? De sources concordantes, l’Indice Ibrahim est financée et pilotée par une institution africaine. Elle vise à devenir la principale évaluation de la gouvernance en Afrique. À cet effet, elle propose un cadre et des outils permettant aux citoyens, aux pouvoirs publics et aux partenaires d'évaluer les progrès accomplis en matière de gouvernance. L’indice compile 86 indicateurs regroupés en 14 sous-catégories et quatre catégories qui évaluent la prestation effective de biens et services publics délivrés aux citoyens africains. Elle utilise 23 sources différentes et recouvre plus de 40.000 données brutes.
L’Île Maurice mène le peloton
S’il y a un pays qui s’est illustré de façon brillante, selon l’indice Mo Ibrahim, c’est bel et bien l’Île Maurice. Il arrive en tête des 53 pays d’Afrique (le Sud Soudan n’étant pas encore pris en compte dans le classement indiciaire de la Fondation) avec 82 points sur 100. Les quatre premiers pays qui le suivent sont le Cap-Vert (79), le Botswana (76), les Seychelles (73) et, l’Afrique du Sud (71 points). Constat : si un pays a pu acquérir la note de 82 points sur 100 dans les domaines de la promotion des droits de l’homme, de la bonne gouvernance, de la justice, il est clair que l’Afrique a de la valeur à revendre dans les domaines sus-cités. L’indice Mo Ibrahim de la bonne gouvernance a la nécessité d’exister, parce qu’il stimule une « saine émulation » entre les États africains. A côté de l’Indice sur la bonne gouvernance existe le prix Mo Ibrahim qui récompense une personnalité dont le leadership est avéré en matière de démocratie. Il distingue et récompense le leadership d’excellence en Afrique.
Pedro Pires du Cap-Vert, un exemple
Pour l’année 2011, c’est Pedro Verona Rodrigues Pires, l’ancien Président du Cap-Vert qui a reçu le Prix Ibrahim pour le leadership d’excellence en Afrique, au cours d'une cérémonie de gala organisée par la Fondation Mo Ibrahim à Tunis. Le prix s’élève à un versement global de 5 millions de dollars sur 10 ans, complété ensuite par une dotation annuelle de 200 000 dollars à vie. En remettant son prix au Président Pires, Salim Ahmed Salim (ancien secrétaire général de l’OUA devenue Union africaine), Président du Comité d’attribution du prix, a déclaré : « Notre choix a été guidé par le rôle tenu par le président Pires pour transformer son pays en un modèle de démocratie, de stabilité et de prospérité. Son leadership a permis au Cap-Vert d’être aujourd’hui internationalement reconnu comme l'une des démocraties les plus stables d'Afrique. » Selon le communiqué de la cérémonie de remise de prix, Salim Ahmed Salim a précisé que « le président Pires a rejeté catégoriquement toute suggestion de modifier la Constitution afin de briguer un nouveau mandat. C’est exactement ce que l’on peut espérer d’un dirigeant dont la longue carrière, marquée par la modestie et l’intégrité, a été consacrée à servir son peuple et son pays ». En recevant le Prix Ibrahim, le président Pires a déclaré : « Le Cap-Vert est parti de peu, mais étape par étape et grâce aux efforts des Capverdiens, nous avons atteint un niveau qui nous permet de mériter la reconnaissance du Comité d’attribution du Prix. Je pense que derrière l’initiative noble et visionnaire du Prix réside une passion franche pour l’Afrique. Il exprime à la fois une préoccupation face à l'avenir, et la confiance que le peuple africain et ses enfants peuvent construire un futur conforme à leur volonté. » la phrase est lâchée : « La confiance que le peuple africain et ses enfants peuvent construire un futur conforme à leur volonté. » Le peuple africain dans son ensemble, son mouvement, son train-train quotidien n’a pas d’autres ambitions que de construire un futur conforme à sa volonté. Seuls les Africains sont capables d’identifier leurs besoins, de monter des initiatives, de mettre en oeuvre ce qu’ils ont conçu pour forger et bâtir une Afrique nouvelle. Cela ne viendra ni de l’extérieur, ni par un coup de baguette magique mais seulement, par la volonté, le courage et, la volonté d’aller de l’avant.
Une année papale pour l’Afrique
La visite du Pape Benoît XVI ne doit pas passer inaperçue à la fin de cette année. Au Bénin, dans un pays où depuis 150 ans, l’Église prie pour les hommes du monde entier, le Pape est venu et a prêché. Il a prêché pour le continent et pour le monde. Le message du Pape a été clair : il y a urgence à mettre en avant une justice sociale qui garantit aux pauvres l’accès aux services administratifs. L’un des mérites de la visite du Pape a été d’obtenir du Président de la République Yayi Boni, de ne pas se représenter au terme de son deuxième mandat qui s’achève en 2016. En effet, le Pape a lancé un appel à tous les dirigeants africains afin qu’ils ne s’éternisent pas au pouvoir. 2012 débute sur de bonnes bases pour l’Afrique.