En marge de la cérémonie de remise du titre de Docteur honoris causa à Abdou Diouf à l’université de Liège, nous nous sommes entretenus avec le Pr Bob Kabamba, chargé de cours au Département de sciences politiques de l'Université de Liège par ailleurs directeur de la Cellule d'appui politologique Afrique- Caraïbes. Lors de cet entretien, il estime que l’Afrique doit encore se démocratiser pour prétendre s’adapter au contexte de la mondialisation.
Qui est Kabamba?
Professeur de science politique à l’université de Liège (ULg) et directeur de la cellule d’appui politologique en Afrique centrale (CAPAC) de l’ULg, Bob Kabamba est né à Bukavu. Après avoir décroché en 1992, à l'ULg, un diplôme de licence en sciences politiques et administration publique, il poursuit avec un doctorat en sciences politiques, qu’il terminera avec la défense d’une thèse consacrée à «l’interrégionalité des pays des Grands Lacs africains». D’abord assistant chercheur en Sciences politiques et Administration Publique (Unité de politologie générale et régionale de l’ULg), puis maître de conférences, il cumule aujourd’hui les fonctions de chargé de cours au département de sciences politiques à Liège et de Professeur invité à la Faculté de sciences politiques de l’université catholique de Butembo en RDC.
Quant à ses domaines de recherches, ils s’articulent aujourd’hui autour de quatre axes : études comparées (concept d’Etat, Etats «fragiles» processus de démocratisation, politiques de développement, intégration régionale, fédéralisme, diasporas.), la prévention et la gestion des conflits, les systèmes électoraux et les processus de décentralisation dans les pays en transition ou en situation de postconflit et, enfin, les relations internationales en Afrique et l’Afrique des Grands Lacs.
Fort de ces compétences et fonctions, Bob Kabamba a aussi multiplié les missions d’expertises au profit d’organismes belges ou internationaux, tels que la Coopération technique belge et le ministère des Affaires étrangères, la Cour Pénale internationale, le Pnud (Programme des nations Unies pour le Développement), etc. En tant que chercheur, formateur ou expert, ce père de trois enfants a également multiplié les publications et s’est vu décerner le prix « African award 2005 », accordé à un Africain vivant en Belgique qui s’est distingué dans un domaine particulier, en l’occurrence l’appui au processus de consolidation de la paix en République démocratique du Congo. Ce militant, Ecolo à Mons, est aussi l'auteur de nombreuses publications et a mené et supervisé des recherches consacrées aux développements socio-politiques, à la résolution des conflits en Afrique centrale, en particulier en République démocratique du Congo.
Entretien
Quelle est votre impression sur la cérémonie de remise du titre de Docteur honoris causa à Abdou Diouf ?
Une satisfaction et une fierté parce que c’est un fils d’Afrique qui est honoré et pas n’importe quel fils. C’est un fils du continent qui a montré la voie par rapport aux idéaux de démocratie qu’il a su préserver. Un idéal qu’il a pérennisé jusqu’au bout. Parce que quand on parle de l’Afrique, c'est souvent en mal. Mais, aujourd’hui, c’est une grande fierté car le Président Diouf est une figure de référence, autant pour les jeunes européens, africains que pour les jeunes du monde entier.
En tant qu’observateur averti et professeur en sciences politiques, comment évaluez-vous les démocraties africaines ?
Il y a beaucoup de choses à dire dans les démocraties africaines, il y a des hauts et des bas. Mais, il faut toujours voir dans une perspective temporelle. C’est à dire regarder d’où l’on vient et là où l’on va. Si l’on voit manifestement d’où on vient, il y a des progrès considérables qui ont été accomplis. Beaucoup de pays qu’on pensait qu’ils ne seraient jamais démocratisés, le sont maintenant. Je pense au Benin qui a eu une dictature très dure avec Mathieu Kérékou et qui, maintenant, a une démocratie de référence. Je pense aussi au Mali qui connait les transitions démocratiques, au Ghana et même au Nigéria qui a battu le record des coups d’Etat et qui, maintenant, est un pays où se pratique l’alternance même si la violence persiste. Mais, de manière très claire, il y a des avancées dans ce pays. Sur les reculs, je pense au Rwanda où l’on espérait des réformes politiques majeures qui permettraient une plus grande liberté de la presse et une démocratisation soutenue.
Face à la globalisation, que proposez-vous aux régimes africains ?
Face à la globalisation et à la mondialisation, les régimes africains doivent arriver à démocratiser leurs relations internationales. Il y a d’importantes ressources naturelles en Afrique et beaucoup d’entreprises qui viennent pomper le pétrole et piller les ressources sans foi ni loi. Or si l’on n’arrive pas à avoir, au niveau africain, une espèce de démocratisation de cette mondialisation, les difficultés vont s’accentuer. Cette démocratisation est indispensable à l'équilibre et le bien-être des pays africains.