Né en 1935 à Léopoldville, actuelle Kinshasa, il fut l’un des précurseurs de la musique congolaise moderne. Maracassiste, chanteur et auteur-compositeur et producteur, Roger Izeidi fait partie de cette génération de musiciens qui ont su adapter la rumba aux valeurs du continent. Pour tous les services rendus à l’Afrique, le président sénégalais Léopold Sédar Senghor l’élèvera à l’ordre
Déjà, en 1952, Roger Izeidi commence à se bâtir une réputation de grand compositeur aux éditions Compagnie d’Enregistrement du Folklore Africain (Cefa) du célèbre guitariste belge Bill Alexandre. Dans cette écurie, il va travailler avec les vedettes de cette époque, notamment Augustin Moniania dit Roitelet, Guy Léon Fylla, Victor Longomba dit Vicky, le doyen Henry Bowane et Marcelle Ebibi. Dans le cadre d’un groupe expérimental de musique et de danse appelé « Les trois Caballeros », il chante avec Augustin Moniania Roitelet et Vicky pour la recherche de fonds. En 1953, Roger Izeidi compose avec Roitelet, deux grands succès aujourd’hui mémorables. Il s’agit des chansons : « Banga Imana » et « Imana ya Daring ». Joseph Kabasele, fondateur et chef d’orchestre de l’African Jazz découvre en lui des dons exceptionnels pour les maracas et l’intégre dans l’orchestre qui fut un groupe composé de bons musiciens. En 1954, il enregistre dans la nouvelle firme Opika. A cette époque, l’orchestre African Jazz se composait de Joseph Kabasele au chant, Déchaud Muamba, Roitelet, Masta Zamba, Taumani et Tino Baroza aux guitares et Kaya Depuissant au tumba, Isaac Musekiwa au saxo, Willy Kuntima Mbemba et Menga Ando aux trompettes et Roger Izeidi et Dialuvila Baskisau aux maracas. Peu à peu viendront le clarinettiste Edo Clary Lutula, Casino, Pepitho et le guitariste brazzavillois Albert Ndinga. Avec la petite expérience qu’il s’est faite aux éditions Cefa, Roger Izeidi produit des oeuvres passionnantes. Il a le feeling qui lui permet de manier, avec rigueur et minutie, sa paire de maracas et ses cordes vocales pour le grand plaisir du patron de la firme, M. Moussa Benathar. Dès lors, les dés étant jetés, Roger Izeidi choisit la voie du professionnalisme aux côtés de Grand Kallé, qu’il secondait à la tête de l’African Jazz.
Un musicien méthodique
Roger Izeidi entretenait la réputation d’avoir un grand sens d’organisation. Mais, en 1963, Roger Izeidi se retire de l’African Jazz et forme avec Nico Kasanda et Rochereau Pascal Tabu, l’orchestre African Fiesta. Ils constitueront la société African Fiesta Sprl. Dans cet orchestre, ils eurent l’idée de créer leur propre maison de production. Il s’agit des éditions « Vita », qui furent une co-propriété. Après l’éclatement de l’African Fiesta en 1965, Roger Izeidi se joint à son cousin Rochereau. Ils créent l’orchestre African Fiesta le Peuple. A l’éclatement d’African Fiesta, Izeidi continuera dans l’édition des oeuvres de ses amis. Un peu plus tard, il quittera Rochereau et créera ensuite lui-même cinq autres éditions, « Roger Izeidi », « Paka-Siye », « Tcheza », « les Artistes Réunis » et « Izeidi Mokoy ». Les éditions « Vita » furent liquidées, et il rachètera ces éditions pour pouvoir évoluer dans la réalisation phonographique. Grand mécène de la musique congolaise, il a eu à lancer plusieurs groupes musicaux, notamment « les Noirs », « Festival des Maquisards », « les Grands Maquisards », et plusieurs artistes-musiciens comme Ntesa Dalienst. Le Maracassiste a produit plusieurs chansons de groupes comme Los Nichelos et les oeuvres de Zatho Kinzonzi, de Jorino, etc.
Infatigable !
En 1985, il monte l’orchestre « African Jazz renové ». Ce groupe musical fut salué dès sa création par des commentaires abondants. Les trois grands concerts qu’il a donnés cette année-là, furent ceux produits à la demande des frères congolais à Brazzaville, à l’Office Zaïrois de Radiodiffusion et de Télévision (Ozrt) et à la soirée récréative commémorant le troisième anniversaire de la mort de Grand Kallé. Cet orchestre a réussi à enregistrer un 33 tours. Le groupe était capable de tout faire. Car, ses éléments étaient pour la plupart issus de l’école African Jazz. La voix de Kallé n’était plus là, mais la guitare de Docteur Nico à travers Vangu Guivano était là. Ils ne se sont pas limités à interpréter des vieilles oeuvres, mais ils composaient aussi leurs propres chansons. Le souhait de Rgoer Izeidi était d’acquérir des instruments de musique. C’était la condition sine qua none de la survie de l’orchestre. Son voeu était de voir les jeunes apprendre à jouer les maracas. Il aimait dire : « les jeunes ont imité Kallé, Rochereau, Docta Kasanda et Déchaud Muamba, mais jamais ils n’ont appris à jouer aux maracas ». Il voyait en ça une négligence qui le faisait souffrir. Les maracas ont disparu sur la scène musicale congolaise, depuis que Roger Izeidi ne jouait plus la musique.
Un homme d’envergure et de dignité
Roger Izeidi fut un auteur et compositeur hors pair qui a excellé dans la rumba congolaise et dans le rythme afro-cubain. Créateur, il a composé plusieurs oeuvres. Et parmi cellesci, figurent « Indépendance cha cha », oeuvre encyclopédique, qui symbolise l’indépendance de la République Démocratique du Congo. Il y a aussi, « Angola siempre » et « Vivo Africa ». Ces oeuvres prouvent son panafricanisme. Roger Izeidi reçût d’ailleurs l’ordre national du mérite sénégalais des mains du président Léopold Sédar Senghor qui reconnaissait l’immense talent de l’artiste qui avait réussi à démontrer aux Africains qu’un jour, l’Afrique s’éveillera. Il avait aussi chanté sur le thème d’amour dans « Bokeyi bwa Sophie », « A Balanco », « A. M. Decantonio », « Mobembo eleki tata », etc. Dans sa vie, l’artiste a aussi organisé beaucoup de réceptions et de dîners de gala. Malade, et malgré les difficultés, il a tenu à garder sa dignité. Il ne voulait pas importuner l’Etat, ses amis et frères. Finalement, il décèdera à l’âge de 66 ans, le 13 janvier 2001, à Kinshasa sa ville natale. (Source Le potentiel)