Article publié le 2011-01-10 par Par Alexandre Korbéogo Dossier
BURKINA FASO / Le barrage de Samandéni [07/2010]
Lac du barrage de Kompienga © Marco Schmidt

Le troisième barrage hydro-électrique et agricole pousse de terre à quelques encablures de l’ouest du Burkina Faso, à 40 km de Bobo-Dioulasso, la capitale économique du Burkina Faso. De nombreux partenaires se sont engagés à financer ce projet.

Le rêve se fait réalité petit à petit dans la bourgade de Samandéni. Longtemps désiré, longtemps cherché, le barrage hydro-électrique et agricole de Samandéni est entré dans sa phase pratique. Ce programme intitulé «Programme de développement de la vallée de Samandéni» (PDIS) permettra de construire un barrage d’une capacité de stockage de plus d’un milliard de m3 d’eau, avec une longueur de 2900 mètres et une hauteur de 23,9 mètres. Il sera le troisième plus grand barrage du Burkina, après ceux de la Kompienga et de Bagré, et couvrira une surface inondée de 150 km2, pour une profondeur de 15 m. Il alimentera une centrale d’une capacité de 16 gigawatt-heure (GWH) et servira à l’irrigation pour la culture de contre-saison, sur une superficie de 21 mille hectares.

Favorable à l’élevage

Situé au confluent de deux affluents du Mouhoun, le plus grand fleuve du Burkina, les infrastructures annexes permettront une disponibilité annuelle de plus de 300 mille tonnes de produits agricoles et 1000 tonnes de produits de pêche. Après la mise en eau du barrage, l’écosystème environnant sera favorable à l’élevage dont le bénéfice chiffré s’élève à 2 mille tonnes de viande et 2 millions de litres de lait. Le site abritera aussi une zone agro-industrielle dotée d’une centaine d’unités modestes de transformation et de conservation. Pour motiver les entrepreneurs à s’installer sur le site, le gouvernement a prévu que la zone sera hors douane et bénéficiera d’un coût étudié de l’électricité. Enfin, la vallée de Samandéni servira à des activités touristiques et au sport nautique. Le gouvernement nourrit de nombreuses ambitions pour ce barrage qui pourvoira 100 mille emplois.

Une véritable mine d’or bleue

Après les lacs artificiels de Kompienga et de Bagré (les deux retenues hydro-électriques), le Burkina Faso avait besoin d’un autre barrage qui réponde aux attentes et aux besoins des populations, surtout sur les plans de l’agriculture et de l’énergie. En 1972, une grande sécheresse a frappé le pays ainsi que tous les pays de la bande du Sahel. La nécessité de faire des retenues d’eau d’envergure régionale s’imposait. En outre, sur le plan de l’agriculture, la sécurité alimentaire était un vain mot.

L’électricité, le casse-tête ‘burkinabé’

Du côté de l’électricité, c’était un casse-tête «burkinabé». Cette situation est réelle aujourd’hui avec les coupures intempestives d’électricité dans la capitale Ouagadougou. Il fallait donc ressortir le projet de la vallée de Samandéni, le dépoussiérer et l’adapter au contexte actuel de développement du monde. Mais pour y parvenir, il fallait d’abord convaincre les investisseurs de la pertinence de ce projet. Ensuite, les inciter à mettre la main dans la poche. Enfin, créer les conditions pour une entame efficace du projet. C’est dans cette optique que des bailleurs de fonds, et non des moindres, ont accepté d’accompagner le pays dans ce projet. En 2007, une dizaine de conventions de prêts relatifs à ce barrage, ont été ratifiées par l’Assemblée nationale. Les prêts seront remboursés dans une échéance de 20 à 30 ans. De nombreux partenaires se sont engagés à financer ce projet, notamment la Banque Ouest Africaine de développement (BOAD), la Banque d’investissement pour le développement au sein des pays de la CEDEAO (BIDC), la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA), la Banque islamique de développement (BID), le Fonds Abu Dhabi pour le développement, le fonds de l’OPEP, le Fonds koweitien pour le développement économiquement arabe (FKDEA) et le fonds Saoudien pour le développement.

Des victimes collatérales Dédommagées

Il est clair qu’un tel lac artificiel ne peut se construire sans un déplacement de populations. Des désagréments qui se caractérisent par l’engloutissement et la destruction par les eaux du barrage de biens individuels et communautaires, le déplacement d’environ 30000 personnes représentant plus de 3000 ménages et enfin le déboisement intégral d’une zone de 150 km2. Ainsi, en septembre 2009, le gouvernement a procédé à l’indemnisation des victimes. Cette indemnisation rentre dans le cadre d’un ensemble de mesures dont le coût global est estimé à 9 milliards 400 millions de F CFA, environ 15 millions d’euros. Au nombre de ces mesures, l’indemnisation en espèces des propriétaires des vergers qui seront engloutis. Des opérations de recensement conduites en 2007 et validées par des missions de vérification réalisées en 2008 avaient permis, selon le coordonnateur du PDIS, Tamoussi Bonzi, d’arrêter un montant global des indemnisations pour les vergers de l’ordre de 2 milliards 435 millions de F CFA, 372 millions d’euros.

Indemnisation de la population

Au total, une dizaine de chèques d’un montant global de 617 643 578 F CFA (plus d’un million d’euros) ont été remis aux représentants des différentes institutions financières de la place pour le compte de 1446 bénéficiaires. Il s’agit là de la première tranche représentant 40% de la somme totale due aux déplacés. Les deux tranches restantes d’un taux de 30% chacune sont prévues en 2010 et 2011. Déjà en mars 2009, une opération pilote conduite par le PDIS avait permis d’indemniser une vingtaine de personnes pour un montant total de 83 millions de francs CFA, 127000 euros.

Quarante deux mois pour finir les travaux

Les travaux de construction du barrage de Samandéni dureront 42 mois. L’entreprise Fadoul est chargée de mener à bon port ce projet qui permettra de donner un nouveau souffle économique à toute la région du grand Ouest et partant, du Burkina Faso. Le coût de la construction du barrage en luimême est estimé à près de 42 milliards de Francs CFA (65 millions d’euros). La centrale hydro-électrique a un coût de 4,124 milliards de F CFA, près de 7 millions d’euros. Le coût du Programme intégré de développement de la vallée de Samandéni (PDIS) est de plus de 305 millions d’euros, soit l’équivalent de 200 milliards de F CFA.

Au vu des moyens colossaux mobilisés, l’on peut affirmer que le barrage de Samandéni est un espoir pour le Burkina Faso.