Article publié le 2010-04-20 par Par Karol Boudreaux Développement
Les femmes peuvent mener la barque [03/2010]
La journée de la femme africaine, le 10/03/09
 avec S.E. l’Ambassadeur M.S.Annadif (UA) à l’extrème gauche
La journée de la femme africaine, le 10/03/09
 avec S.E. l’Ambassadeur M.S.Annadif (UA) à l’extrème gauche
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Lors du sommet sur la sécurité alimentaire de Rome en décembre dernier, les dirigeants du monde ont unanimement renouvelé leur engagement à éradiquer la faim. Mais qu’en est-il si ce projet, si admirable soit-il, est en réalité trop compliqué à réaliser? Alors, voici une idée: faire confiance aux femmes.

Lors du sommet sur la sécurité alimentaire de Rome en décembre dernier, les dirigeants du monde ont unanimement renouvelé leur engagement à éradiquer la faim. Le sommet Sud-Sud de Nairobi a ensuite lui encore renouvelé cet engagement dans les objectifs du millénaire pour le développement de l’ONU (OMD), baptisé «projet pour un monde meilleur» par le secrétaire général Ban Ki-Moon. Mais qu’en est-il si ce projet, si admirable soit-il, est en réalité trop compliqué à réaliser?

Les pays en développement sont censés atteindre les OMD d’ici 2015. Ces derniers impliquent de réduire de moitié les niveaux de la faim et de la pauvreté, réduire la mortalité infantile et maternelle, améliorer la qualité environnementale, accroître l’autonomie des femmes et l’égalité entre les sexes, réduire les taux d’infection VIH et fournir une éducation universelle. Les progrès ont été lents et, en Afrique subsaharienne en particulier, de nombreux objectifs ne seront pas atteints.

Alors, voici une idée. Et si l’ONU et ses États membres mettaient au rebut huit des OMD et se concentraient plutôt sur une hypothèse radicale: faire confiance aux femmes? Et si, au lieu de huit OMD, chacun avec de multiples objectifs, les pays se focalisaient sur l’objectif nº3, accroître l’autonomie des femmes, en particulier des femmes pauvres? Cela pourrait en fait accélérer les progrès sur les sept autres OMD.


Quelles preuves étayent cette affirmation?

Une étude réalisée en 2000 par l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI) a constaté que les femmes sont la clé de la sécurité alimentaire dans des endroits comme l’Afrique subsaharienne et certaines parties de l’Asie du Sud. Cette étude a conclu que l’amélioration conjointe de l’accès des femmes à l’éducation et de leur statut social, était responsable de 55% de la réduction totale observée de la malnutrition infantile parmi les familles de l’enquête. Ces facteurs ont été considérablement plus importants que l’augmentation des approvisionnements alimentaires. En 2004, une étude de la Banque mondiale trouvait «d’amples preuves empiriques qu’une meilleure éducation des femmes réduit la mortalité infantile».

Comme l’ancien Secrétaire général des Nations unies Kofi Annan l’a déclaré lors d’une célébration de la Journée internationale de la femme en 2003: «Quand les femmes sont pleinement impliquées, les avantages peuvent être immédiatement vus: les familles sont en meilleure santé et mieux nourries; leur revenu, leur épargne et réinvestissement s’accroissent. Et ce qui est vrai des familles est également vrai des communautés et, dans le long terme, de pays entiers».

Il y a dix ans une étude de la Banque mondiale indiquait que le revenu des femmes a plus de chances d’être utilisé de manière productive, en termes de promotion du bien-être familial et de la santé, que le revenu des hommes. Plus récemment, la très médiatisée Commission pour l’Afrique de Tony Blair est arrivée aux mêmes conclusions. La Commission a constaté que, par rapport aux hommes, les femmes qui ont des ressources économiques investissent davantage dans l’éducation et la santé de leurs enfants.
Ces investissements dans la scolarité peuvent avoir un énorme impact positif. L’étude de l’IFPRI inclut une enquête en Égypte, qui a montré que lorsque le niveau d’éducation de la mère passait de zéro ou d’une éducation primaire partielle à un enseignement primaire complet, la proportion de la population vivant au-dessous du seuil de pauvreté chutait de plus de 30%. Améliorer les compétences des femmes et accroître leurs opportunités économiques se révèle être une stratégie importante pour réduire la pauvreté.

L’une des façons de développer les compétences, renforcer les capacités et accroître les possibilités économiques des femmes est d’aider les femmes entrepreneurs. Partout dans le monde en développement, des femmes créent et gèrent des entreprises. La plupart sont de petites et moyennes entreprises qui contribuent à soutenir une famille et peuvent en employer quelques membres, des amis ou associés. Changer l’environnement juridique et social pour rendre plus facile et moins coûteux pour les femmes d’ouvrir une entreprise, d’acquérir et de transférer des titres de propriété, et d’obtenir un crédit, stimule l’entrepreneuriat et l’autonomie des femmes.

Lucia Quachey, présidente de l’Association ghanéenne des femmes entrepreneurs, l’exprime ainsi: «quand une femme a une source régulière de revenus, elle devient très confiante et prend son propre destin en main, elle gagne en estime de soi: c’est l’autonomie (empowerment)» Cette autonomie a de larges effets positifs sur le développement humain.

Avec cinq années restant pour réaliser les OMD et des progrès jusqu’ici décevants, il est temps de recentrer les efforts de l’ONU et des pays en développement sur les approches qui fonctionnent. L’autonomie des femmes réduira directement la pauvreté et ses effets, alors allons bâtir sur ce que les études nous enseignent: les femmes peuvent mener la barque.