Article publié le 2010-01-06 par Ariane POISSONNIER Culture
La Fin de la Pauvreté ? Un film qui pose la question de la place de chacun dans le concert des nations [01/2010]
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Images du film
Copyright : Cargo FILMS
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(MFI) La Fin de la Pauvreté ? Tel est le titre du film de Philippe Diaz qui sort ce 16 décembre 2009. Un film-choc pour une question (apparemment) toute simple : alors qu’il y a tant de richesse dans le monde, pourquoi y a-t-il encore tant de pauvreté ? Plus d’une heure quarante de réponses en images dont chaque citoyen du monde fera son miel, pour peu que l’avenir le préoccupe un tant soit peu.

«Alors qu’il y a tant de richesse dans le monde, pourquoi y a-t-il encore tant de pauvreté ?» Tel est l’argument du film documentaire de Philippe Diaz actuellement sur les écrans de France et des Etats-Unis, après avoir été projeté dans plus de 30 festivals d’horizons variés. Un film-choc que tout citoyen du monde devrait aller voir. Honnêtes hommes, activistes écologistes, militants des droits de l’homme et spécialistes du développement mais aussi banquiers, analystes financiers, militaires, responsables politiques et chefs d’Etat : tous y apprendront quelque chose, et aucun n’en sortira sans interroger ses propres convictions.

«Le problème a commencé il y a cinq cents ans, affirme Philippe Diaz, réalisateur et producteur. On s’est mis dans un piège, celui du pillage : 25 % de la population mondiale consomment plus de 80 % des richesses disponibles tout en assurant 70 % de la pollution. Pour continuer à vivre comme nous le faisons, c’est mathématique, il faut continuer à piller. Jusqu’où va-t-on aller ? Jusqu’à l’annihilation de populations entières ?»

Accueillir les projets indépendants de production et de diffusion

Depuis que Philippe Diaz a fait des études de philosophie politique et de philosophie de l’art, il y a «un côté social et politique» dans tout ce qu’il réalise. Né à Paris, il commence sa carrière en 1980 en tant que réalisateur. Il deviendra bientôt producteur (Mauvais Sang, de Leos Carax, ou La nuit bengali, de Nicolas Klotz). Installé à Los Angeles, aux Etats-Unis, à partir de 1991, il revient à la réalisation pour Nouvel ordre mondial (quelque part en Afrique), qui sort en version française en 2000 : «Il fallait soit faire ce projet, soit l’abandonner. J’ai décidé de le faire moi-même.» Commenté par Michel Piccoli, le documentaire obtient plusieurs prix internationaux.

En 2003, Philippe Diaz crée, avec différents partenaires dont la productrice Beth Portello, Cinema Libre Studio, une structure dont l’objectif est d’accueillir les projets indépendants de production et de diffusion, le plus souvent de films à thèmes sociaux. Peu après, c’est la Fondation Robert Schalkenbach qui vient le voir. Cette fondation née en 1925 aux Etats-Unis a pour objectif de diffuser les idées d’Henry George dont le best-seller, Progrès et pauvreté, affirme que la concentration des richesses dans les mains des propriétaires terriens est la cause de la pauvreté. «Ils sont venus me voir en tant que réalisateur ; ils voulaient depuis des années faire un film sur l’histoire de la pauvreté. J’ai accepté à condition d’avoir carte blanche. Les premiers tournages ont débuté en 2006. Il nous a fallu trois ans de travail pour réaliser ce film.»

Témoigner de la violence subie par les pauvres

Trois années ont été nécessaire pour enregistrer les témoignages de la violence subie par les pauvres, la violence générée par l’histoire économique des 500 dernières années : des favelas d’Amérique latine aux bidonvilles d’Afrique, des économistes de renom, des personnalités politiques et des acteurs sociaux révèlent comment les pays développés pillent la planète, suscitant la pauvreté au Sud, mais aussi et de plus en plus en leur propre sein. Deux prix Nobel d’économie, Amartya Sen et Joseph Stiglitz, l’auteur du best-seller «Confessions d’un tueur à gages économiques», John Perkins, le président du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers-monde, Eric Toussaint, la présidente d’honneur d’Attac-France, Susan George, mais aussi de nombreuses victimes de la pauvreté témoignent : peu à peu s’articule sous les yeux du spectateur un système économique dans lequel le Sud a financé le Nord et continue de le faire, d’abord à travers les conquêtes subies, puis ensuite par le truchement de certaines institutions internationales et l’application imposée de certains modèles économiques. «Je n’ai pas voulu, précise Philippe Diaz, inclure des témoignages de personnalités politiques comme Hugo Chavez ou d’autres. Car le problème est plus grave que les étiquettes politiques ; c’est encore beaucoup plus grave que le réchauffement climatique. Si on n’y change rien, on aura de plus en plus de terrorisme, de plus en plus de guerres de ressources.»

Réforme agraire et décroissance

Les deux solutions évoquées - la réforme agraire, pour mettre fin à la monopolisation des terres, et la décroissance, pour mettre fin à la surconsommation qui menace l’habitabilité future de la planète - le sont rapidement. Mais ce parcours très riche - trop riche ? - à travers l’histoire économico-politique de notre monde a le mérite de proposer une compréhension globale des mécanismes qui pérennisent la pauvreté et, par là, de secouer nos certitudes, à partir d’un constat tranchant : nous sommes six milliards d’humains ; un milliard d’entre nous a faim tous les jours, et toutes les 3 secondes, une personne meurt de cette faim. Peut-on encore ignorer la pauvreté ?

La Fin de la Pauvreté ?, un film documentaire de Philippe Diaz, avec la voix de Charles Berling, durée 1 h 44. Distribution Cargo Films, Jean-Jacques Beineix.