Article publié le 2008-04-27 par Cyrille Momote Kabange International
Barak OBAMA : Trois raisons pour croire en ses chances [03/2008]
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Le candidat à la candidature démocrate Barak Obama n'est plus qu'à un doigt de réaliser l'exploit du siècle : Être le premier Noir à devenir candidat à la Présidentielle aux Etats-Unis. L'événement serait encore plus éblouissant si il réussissait à être porté Président de la nation la plus puissante du monde. On n'est pas encore là.

Barak Obama caracole en tête en termes de primaires et caucus remportés ainsi du nombre plus élevé de délégués à la Convention démocrate du mois d'août 2008 (1.364 délégués contre 1.263). Il restait jusqu'au 4 mars pour les deux candidats à se disputer les deux Etats très pourvus en délégués : le Texas et l'Ohio. Deux semaines auparavant, les sondages donnaient les concurrents démocrates au coude à coude dans ces deux circonscriptions, habitées pour l'une par une forte communauté hispanophone et pour l'autre par une majorité de Blancs. Des ingrédients qui, selon une opinion répandue, relèveraient plutôt la sauce d'Hilary Clinton. Il existe bien d'autres poncifs comme celui-là qui berce les nuits de ceux qui veulent, malgré tout, résister à cette véritable lame de fond qu'est l'avènement d'Obama. Ils évoquent à chaque novelle avancée du candidat noir, notamment, son inexpérience et son discours enrobé qui ne prendrait pas en compte les réalités du monde actuel.

Sans doute, il restera toujours difficile de prédire l'avenir et, au-delà, les sinuosités d'une conjoncture très volatile : les sondages peuvent se tromper comme on l'a vu lors des deux primaires importantes au début du mois de février. Alors qu'ils donnaient M. Obama gagnant, c'est Mme Clinton qui tira son épingle du jeu. De même, le système électoral semble pervers à cause d'une singularité qui veut que lors des primaires démocrates, la désignation ne voit pas seulement la résultante du scrutin majoritaire mais dépende aussi des grands électeurs, sorte de délégués supérieurs du parti, dont l'avis est décisif.

Les Américains prêts pour la révolution culturelle ?

Néanmoins, il y a comme un bémol : En cas d'un écart significatif entre les candidats à la candidature, celui qui arrive tête l'emporte. Là il n'y a pas photo. N'empêche que les Etats-Unis sont entrés dans une ère d'incertitudes. L'impression générale est qu'une frange importante d'Américains, parmi laquelle trônent les jeunes et les minorités visibles, prennent la mesure d'une véritable révolution culturelle. Si le concept ne venait pas d'un auteur comique comme Aristophane qui a vécu à Athènes au siècle de Périclès (Vème et VIème avant J.C.) et qui, dans sa pièce les « Nuées » se moquant de l'inusable Socrate, le comparait à un « Deus ex machina », un dieu qui descend à l'aide d'une machine, on oserait presque l'attribuer au phénomène Barak Obama, toute ironie méchante en moins.

Trois raisons pour croire en ses chances

Primo : Jeune et beau, c'est son côté glamour dans un pays où le jeunisme est un comportement bien répandu, Barak Obama est la réponse vivante à une problématique que dissimulent les images d'Epinal d'une société qui aurait résorbé ses clivages socio-ethniques, digéré la Guerre de Sécession, dissipé les effluves de l'échec d'un projet hégémonique rendu presque faisable dès la chute de l'Union soviétique mais qui aurait déjà montré ses limites après la guerre ratée au Vietnam. En réalité, les Américains n'ont pas aujourd'hui le cœur à l'ouvrage. Leur sentiment se nourrit également d'un nouveau contexte alimenté surtout par les conséquences désastreuses de la politique étrangère de George Bush, qui donne l'impression de ne résoudre aucune des questions majeures pouvant façonner l'image de marque des Etats-Unis à l'extérieur : la question de la démocratie au Moyen-Orient, sous le prétexte de laquelle les troupes américaines sont allées guerroyer en Irak, et le dossier israelo-palestinien.

Dans le sillage des peurs suscitées par les attentats du 11 septembre 2001 se greffent les incertitudes liées à une sorte de perte de puissance des Etats-Unis dans les zones de combat où ils sont engagés : Irak et Afghanistan. C'est ce climat délétère qui prévaut en Amérique et qui fait qu'un leader aussi emblématique que l'est la sénatrice Hilary Clinton puisse être ravalée à jouer les seconds rôles.

Des révélations de discrimination systématique

Secundo, les révélations faites ces derniers jours par les Associations de défense des droits de l'Homme au sujet de la discrimination systématique ajoutent foi aux arguments de ceux qui, dans le monde et aux Etats-Unis, voient d'un bon œil la perspective d'un changement radical de la société américaine. Cette dépêche de l'Agence France Presse du 23 février 2008 nous conforte dans l'hypothèse d'un succès à terme de Barak Obama : « Alors qu'un Noir a de sérieuses chances d'occuper la Maison Blanche, les Etats-Unis se rendent coupables de discrimination raciale persistante et systématique depuis les geôles de Guantanamo jusqu'aux tribunaux et cours d'écoles, ont accusé ce mercredi 20 février ces associations. Elles évoquent l'impact du cyclone Katrina sur la population noire de la Nouvelle Orléans, la situation des travailleurs migrants, les brutalités policières ou le logement. Human Rights Watch remarque que les jeunes d'origine africaine ou d'autres minorités sont davantage victimes de châtiments corporels à l'école et plus souvent condamnés par les tribunaux à la réclusion à perpétuité, sans possibilité de remise de peine », conclut le correspondant de l'AFP.

Dans le registre des primaires démocrates, cette situation a des relents qui peuvent sentir mauvais dans un Etat comme le Texas où la forte implantation d'hispanophones, qu'on dit acquis à Hilary Clinton, peuvent se reconnaître dans les contradictions d'une Amérique Blanche dont le modèle intégrationniste peut être d'une grande perversité du fait de la persistance des structures qu'elle prétend par ailleurs combattre.

Tertio, à l'échelle du vote national, dans l'hypothèse où Obama sort vainqueur des primaires, son adversaire républicain John McCain, selon toute vraisemblance, sera battu, fondamentalement à cause des motifs existentiels décisifs. Les Américains veulent, en tout cas, retrouver leur âme, celle qui est l'opposée de la mentalité déprimante qui marque leur histoire récente du sceau infâmant de fauteurs de guerres, une sorte de salaud sartrien, incapable de réenchanter le monde. Et ce n'est pas à un McCain, 71 ans, que même ses coreligionnaires plus âgés, 78-81 ans, trouvent très vieux, et donc dépassé par les enjeux d'une aggiornamento de la société américaine et de sa place dans le monde, qu'il faudra confier cette tâche herculéenne. Sans doute qu'Obama ou Hilary peuvent faire l'affaire. Le courant porte plutôt le premier, avec son âge, 46 ans, inférieur à celui de l'adversaire, 60 ans. Quelle belle lapalissade ! Et pourtant …