« I have a dream ». J'ai fait un rêve … La célèbre phrase du pasteur Martin Luther King prononcée au début des années 60 à l'issue de la « Marche des droits civiques » à Washington, résonne fortement ces derniers jours aux oreilles avisées d'observateurs des primaires américaines. Et pour cause !
Plus que toutes les précédentes élections prési-dentielles aux Etats-Unis, celles qui vont avoir lieu en novembre 2008 remettent en selle les idéaux de l'illustre Révérend par la présence d'un Noir dans la course à la Maison Blanche. Assez différent de ses congénères anciens malheureux candidats aux précédentes primaires et dont le profil semble correspondre au format de leader charismatique, capable de convaincre les Américains, toutes tendances et fortunes confondues, en ce moment de la perte de l'image de marque et de récession économique aux Etats-Unis. Cette effervescence médiatique et populaire à travers le monde autour de Barak Obama n'est certes pas injustifiée. Mais elle recadre le problème racial et désigne en toile de fond son caractère latent dans un pays où le concept de Nation reste à la surface d'une réalité sociologique complexe.
Dans un pays immense constitué de citoyens aux origines diverses et dont l'histoire procède plus d'une volonté extraordinaire de faire vivre côte à côte des identités multiples que d'un mythe fondateur, la question raciale exhale encore son parfum, particulièrement dans les Etats du sud. A Atlanta ou à Memphis, il n'est pas rare, de nos jours, d'apercevoir flottant au vent sur certains édifices des drapeaux remontant à la période de la Guerre de Sécession. Ceux que brandissaient justement les cerbères du Klu-Klux Klan dans l'Alabama, transformé en un lieu de supplice per-manent pour des Noirs privés de tous les droits, civiques et autres.
Les fruits de la lutte de Martin Luther King
Sans doute, les Etats-Unis ne connaissent plus l'esclavage des Noirs au sens premier du terme, ni la ségrégation du type (écoles pour les White ONLY), ni l'humiliant colour bar à la sauce sud-africaine des années apartheid. Ce sont les changements dûs à la lutte non-violente de Martin Luther King qui ont, par ailleurs, bouleversé l'échiquier administratif et légal. Pourtant, le Révérend rêvait d'une Amérique transformée de l'intérieur et qui aurait surmonté les obstacles psycho-sociaux alimentés par des événements passés pour devenir une Nation unie, solidaire et juste.
C'est dans ce contexte que le surgissement d'Obama sur la scène politique américaine défie les lois du genre et détonne dans un environnement culturel où les principes les plus nobles n'ont pas toujours été la norme culturelle de la majorité. Souvenez-vous du sort fait aux leaders charismatiques : John Kennedy, Robert Kennedy, Martin Luther, tous assassinés. Il s'agit bien d'un cas. Barak, qui signifie « béni des dieux » en swahili, s'incarne-t-il dans la personne de ce « jeune homme » de 46 ans ?
Toujours est-il qu'un sondage CNN, daté du 21 janvier 2008, en marge de la percée de Barak OBAMA, signale que sur la question raciale les opinions des différentes communautés aux Etats-Unis sont moins dissemblables qu'on ne pourrait le croire : 43 % des Blancs et 44 % des Noirs pensent que les idéaux de Martin Luther King ont été largement atteints, 47 % et 41 % qu'ils l'ont été « moyennement ». En revanche, 52 % des Noirs pensent que les relations raciales resteront un problème pour le pays contre 43 % des Blancs.
Pourtant, l'optimisme est écrasant chez les Blancs en ce qui concerne l'élection d'un chef d'Etat de couleur. En effet, 72 % des Blancs pensent que le pays est prêt pour un président noir.
Le temps est encore long et le système électoral américain est si alambiqué. N'étant pas la Pythie, nous pouvons néanmoins souligner le caractère exceptionnel de ce qui se passe aux Etats-Unis.